"Pour Annick (sur l'enveloppe),
ce livre ne t'apportera rien de consolant, mais du moins reçois-le comme le témoignage de mon affection qui ne te manquera pas, aussi longtemps que vivre sera possible - et peut-être, au-delà, par le souvenir."
N'en déplaise à Gutenberg, le manuscrit jamais ne s'effacera sous l'imprimé et aux solides caractères de plomb répondent les fragiles lettres de plume. Chef-d'œuvre en devenir et confidences intimes, prosaïques ou idéalistes. Écritures hâtives ou appliquées, pattes de mouche ou chant du signe.
Lettre autographe signée de Victor Hugo adressée à son ami H. de Cambier, 20 lignes écrites à l'encre noire sur un bifeuillet, adresse autographe au verso du dernier feuillet.
Superbe lettre probablement inédite de Victor Hugo invitant son correspondant aux fameuses soirées du Cénacle des Romantiques à l'Arsenal, véritable institution littéraire sous la Monarchie de Juillet.
"Ce samedi 6,
j'ai remarqué l'autre soir, Monsieur ; que vous disiez, avec quelques accents de regret, n'avoir pas de bal pour dimanche (demain).
Or, je viens de m'arranger à mon corps-de-garde de manière à être libre demain de neuf heures à minuit (je n'ai pu malheureusement obtenir plus de six heures) et j'en profite pour mener ma femme à une petite sauterie en mascarade chez Nodier. Si vous voulez venir avec nous, nous en serions charmés et Nodier aussi. Il faudrait pour cela vous trouver chez moi à neuf heures, heure à laquelle j'y rentrerai moi-même - Répondez-moi ce mat., et croyez à toute mon amitié. Vr Hugo."
Edition originale, un des 120 exemplaires numérotés sur vergé, tirage de tête.
Bel exemplaire.
Lettre autographe datée et signée d’Antonin Artaud, à en-tête de la brasserie Le Dôme, adressée à Maurice Martin du Gard, fondateur et directeur des Nouvelles Littéraires, 29 lignes à l’encre bleue d’une écriture nerveuse.
Traces de pliures et petites déchirures marginales inhérentes à l’envoi postal et à la manipulation. Petites taches au début de la lettre.
Antonin Artaud se bat pour publier son article sur la peinture de Balthus, exposée pour la première fois en France. Il défend avec férocité celui qu’il considère comme son « double », tant ils étaient semblables physiquement et intellectuellement.
Carte postale autographe signée de Jean Paulhan, 22 lignes rédigées à l'encre noire adressée à Felia Leal l'éditrice des "Paroles transparentes", ouvrage de Jean Paulhan orné de 14 lithographies originales de Georges Braque.
Trace de pliure centrale sur la carte qui représente le tableau de Georges Braque intitulé : Cliffs and Boat.
Jean Paulhan prend des nouvelles de sa correspondante : "Etes-vous tout à fait guérie ? Si c'était moi plutôt qui allais chez vous ? " et s'étonne de la petitesse des taxis parisiens : "Ces taxis pour personnes naines sont effroyables..."
De l'étroitesse des taxis, Jean Paulhan bascule sur la frilosité éditoriale de Gallimard : "Imaginez que G.G. ne garde ni Blanchot, ni Noël Devaulx, ni... ni... [...] Au fond G.G. devient Hachette et toute l'expérience de la (jeune) nrf est à recommencer."
Longue lettre autographe signée de Claude Farrère, 160 lignes environ à l'encre bleue (8 pages sur deux doubles feuillets), à son ami Pierre Louÿs le remerciant notamment pour sa délicatesse.
Traces de pliures inhérentes à la mise sous pli, enveloppe jointe.
Claude Farrère loue la délicatesse de son ami à son égard : "Merci pour votre lettre... non seulement parce qu'elle est exquise, - six fois plus que vous ne pouvez le croire, - mais bien davantage parce que je sais très bien que vous me l'avez contée pour "ne pas m'inquiéter..." comme vous dites." et s'étonne des problèmes soulevés par ces récents articles : "Soit dit entre parenthèses, je suis tout ahuri de celle qui a trait à des articles de polémique. Non seulement je n'en ai point écrit."
Il s'inquiète plus des suspicions qu'il suscite à propos de sa prétendue consommation d'opium : "J'ai été informé par mon propre commandant que le ministère, sur la foi de mon premier livre, supposait que l'opium ne m'était pas étranger. Le même commandant a protesté, arguant que, depuis tant de mois que je servais sous ses ordres, il avait la certitude absolue que je n'avais pas commis le moindre péché ! Mais je doute que sa parole soit très appréciée à Paris..." et de la haine que lui voue un officier.
Malgré ces problèmes, Claude Farrère tient à rasséréner son ami : "Je tiens, mon bien cher ami, à ce que vous soyez absolument en paix à mon propos. Je m'en fiche moi-même absolument." tout en se désolant que ce dernier délaisse le sud de la France cette année : "Tamaris sans vous, comment voulez-vous que la mécanique céleste continue de tourner ? Et moi (?) Vous me pousseriez systématiquement au suicide. N'oubliez pas que je fais un bouquin tout à fait sanglant, et que je vis dans l'inique société de gens qui, pour un demi-oui ou un quart de non, s'ouvrent le ventre ! "
Il achève sa lettre par de nouvelles rumeurs le concernant : "Bien entendu, madame de X a supposé gratuitement des choses horribles : je ne suis pas l'amant de l'autre dame de chez la modiste. Voyons ! comment un jeune homme tel que moi, décent, et trop bien élévé (cf opinion de madame P.L.) etc..."
Lettre autographe datée et signée de Jacques Mesrine, datée du samedi 22 Septembre1976, 67 lignes à l'encre bleue sur une page recto verso adressée à son amour de l'époque, Jeanne Schneider, grâce à qui le manuscrit de l'Instinct de mort fut discrètement sorti de prison.
Jacques Mesrine, alors incarcéré à la prison de Fleury-Mérogis et privé de chaleur humaine, s'enthousiasme de toutes les visites qu'il reçoit au parloir, battant ainsi en brèche le mythe du bandit asocial et dénué de sentiments humains : "Et après cela on dira que je suis un sauvage ! non justement et les gens qui ont eu un contact avec moi, désirent me revoir. Cela m'a fait un immense plaisir et sais-tu la suite... elle va demander aussi pour te voir. Parait-il que je suis regretté par les infirmières "monsieur sourire" voilà le secret."
Il a apprécié tout particulièrement la visite de l'infirmière de la prison de la Santé qui sera également leur témoin de mariage avec Jeanne Schneider et qu'il encense : "... une énorme surprise ! tu ne devineras jamais qui est venu me voir ! Mon infirmière de la santé... oui ma puce... cette charmante dame aux cheveux blancs que tu avais vu au parloir à la santé et qui doit être notre témoin à notre mariage [...] C'est une femme exceptionnelle, ancienne infirmière militaire et assez bien placée au ministère. Pendant mes 2 ans et demi à la santé je l'ai considérée comme une mère, cette femme est dévouée, que cela n'en est pas pensable. Malheur à celui qui toucherait un seul de ses cheveux."
L'ennemi public N°1 en profite encore pour briser cette réputation de fauve sanguinaire qui lui colle à la peau : "Si les journalistes savaient que toutes les infirmières entraient seules dans ma cellule et en toute confiance, on serait loin du "fauve" et de la prise d'otages à la Buffet. Les infirmières ont toujours été sacrées pour moi. Elles sont intouchables comme pas mal d'autres personnes, mais cela les pédés de journalistes l'ignorent ; car ils ne sont pas dans mes pensées et c'est regrettable parfois. "
Jacques Mesrine le révolté se surprend à apprécier sa solitude carcérale : "Sais-tu que je commence à me plaire ici... Quel calme tu sais manou, mon isolement, je le supporte dans la mesure où j'ai la paix. En détention il n'est pas prouvé que je l'aurais. C'est de mes réactions que j'aie peur... et la mentalité des prétendus truands est de plus en plus dégueulasse ! [...] dans mon isolement, il y a du bon et du mauvais... mais personnellement, je ne veux pas me plaindre... car il n'y a pas de motif à le faire." et achève sa lettre par des considérations paternelles pour sa fille peu assidue à l'école et pour laquelle il se fait du mouron : "Je vais savoir si Sabrina a été régulièrement à ses cours... je fais le vœu que oui car si le cas contraire se présentait... pas de pitié cette fois-là... Mais que de souci peut représenter cette môme et quelle impuissance j'ai à la contrôler en étant ici !"
Rare et très belle lettre de Jacques Mesrine débordant de révération pour la corporation des infirmières et de regrettable détestation pour celle des journalistes.
"Ce 1er juillet Tilsit
Je reçois à l'instant ma petite Aimée tes lettres du 19 et 20 juin. Il me semble être près de toi et éprouver toutes les angoisses dont j'ai déjà été tourmenté dans les occasions pareilles, mon impatience d'apprendre l'événement est extrême. Le courage que tu montres à l'approche et sérieusement me rassure et dissipe les vives inquiétudes dont je ne pouvais me défendre il y a quelques temps.
[...]
Il faut occuper ma petite Aimée de bien soigner ta santé afin qu'en arrivant à Paris je te retrouve parfaitement remise de tes couches et que nous puissions jouir ensemble de Savigny le reste de la belle saison.
Car les affaires prennent ici une telle tournure que je puis conserver l'espérance de t'embrasser sous deux mois au plus tard. [...]
Il me semble ma bien bonne amie ne t'avoir jamais donné lieu à concevoir de pareilles craintes mais en voilà assez sur cet article.
Parlons un peu de notre Joséphine. Elle montre une intelligence bien supérieur [sic] à son âge que je lui scai [sic] gré de toutes ces gentillesses et de toute cette humeur qu'elle te montre.
Je lui envoie à cause de cela des caresses à discrétion. Mille choses tendres à notre bonne mère. Rassure la sur la santé de Desessart de Beaupré et de tout ce qui l'intéresse en me rapelant [sic] au souvenir de ma belle soeur annonce lui que son brave et estimable mari jouit d'une parfaite santé.
A Dieu ma petite Aimée, reçois les embrassemens de ton amoureux et fidel époux. L. Davout"
Lettre autographe signée du maréchal Davout à son épouse, Aimée Leclerc. 2 pages et demi à l'encre noire sur une double feuille. Traces de plis inhérentes à l'envoi.
Lettre, très probablement inédite ("la correspondance intime du maréchal Davout cesse d'août à novembre [1807]" indique à tort la marquise de Blocqueville dans Le Maréchal Davout, prince d'Eckmühl, raconté par les siens et par lui-même) adressée à sa très chère épouse, belle-soeur de Pauline Bonaparte. Installé dans son palais à mi-chemin entre Varsovie et Łódź, Davout désormais gouverneur général du Duché de Varsovie se languit de son épouse et de leur propriété de Savigny sur Orge : "mais quoique cet endroit soit un des beaux du pays il est à cent mille lieux de Savigny". Il incite surtout la maréchale à apparaître à la cour et demeurer proche de l'Empereur ; elle était notamment chargée de faire les demandes de permission de son mari auprès de Napoléon lui-même. Davout ne pouvait que difficilement s'échapper de Pologne ("Si je pouvais prévoir l'époque de mon retour définitif") afin de s'occuper, entre autres, des affaires maritales de sa cousine Hélène Davout : "je te prierais si notre cousine n'a pas un grand attachement pour son futur de la convaincre que dans les prochains six mois nous trouverons à l'établir plus avantageusement mais il peut survenir des événements qui ne permettent pas d'aller en permission". Cette dernière finira par épouser à Varsovie en 1808 le général François-Louis Coutard.
Lettre très visuelle portant une belle signature du maréchal Davout.
Lettre autographe signée du maréchal Davout, alors gouverneur général de Pologne, adressée à son épouse Aimée Leclerc, belle-soeur de Pauline Bonaparte. Trois pages à l'encre noire sur une double feuille, avec son adresse autographe au verso, ainsi que le tampon de la Grande Armée, et un cachet de cire brisé, armorié au chiffre « LD » sur grand manteau et bâtons de Maréchal sous couronne.
Déchirures dues à l'ouverture avec atteinte à deux mots de la troisième page.
Après l'éclatante victoire personnelle de Davout à Auerstaedt, les batailles de Iéna, d'Eylau et de Friedland qui mettent fin à la guerre contre la quatrième coalition, Davout récolte les fruits de sa réussite. Couvert d'honneurs et de bienfaits par l'Empereur, il jouit de ses vastes terres en tant que nouveau gouverneur général de la Pologne.
"Hier ma petite Aimée je t'ai donné de mes nouvelles. J'ai oublié de te parler de celles de nos parents. Leur santé est aussi bonne que la mienne. Sous peu de jours, je pense t'annoncer que Sa majesté leur a donné de nouvelles marques de sa bienveillance. [Marc-Antoine Bonin de la Boninière de] Beaumont est toujours à Varsovie avec la goutte. D'abord il y a longtemps que je n'ai eu de vos nouvelles j'ai chargé Laforêt porteur de cette lettre [...] il doit ainsi me rapporter tes lettres puisqu'il y en aura.
Adieu ma petite Aimée, [...] mille caresses pour notre Joséphine et mille baisers à sa belle et vaillante Maman. Ton amoureux [...] L. Davout"
Billet autographe signé de Remy de Gourmont adressé à un écrivain avec qui il collabore, 1 page sur un double feuillet, 14 lignes à l'encre noire, à propos d'une somme dûe à un éditeur : "On lui doit 3 fr, versables quand Ducoté aura donné les fonds du mois de juillet."
Deux petites taches au verso du billet autographe.
Lettre autographe datée et signée d'Henri II de Bourbon, prince de Condé et père du Grand Condé, 2 pages sur un feuillet, 27 lignes à l'encre noire.
Petites restaurations et mouillure en marge gauche du feuillet. Discrète annotation d'un ancien possesseur en tête du verso de la lettre.
Bien qu'il reconnaisse toute l'atrocité du crime perpétré par le sieur Cardinet sur la personne du fils de l'un des plus importants magistrats de la ville de Bourges, Henri II s'engage à intervenir en faveur de l'assassin : "... l'action qui sest passee a Bourges est très méchante estant un assassinat très inhumain fait en plein jour contre le fils dun des principaus magistras de la ville. Japorteray pour vostre respect tout mon pouvoir pour ledit Cardinet et espère pour lamour de vous et pour lobeissance que je vous veus rendre le tirer daffaire..." mais en aucun cas pour ses complices : "Je dis lui seul car pour les autres complices je tiens la chose impossible sans une abolition du Roy principalement estants tous prisonniers presentement je despescheray à Bourges a cet effet est en ceste petite occasion que je voudrois estre plus grande..."
"Ce soir je suis très mal foutu... il est 19 heures et je me couche juste après la fin de ta lettre... de rien de grave... juste une grande fatigue (à rien faire)"
"Comme cela la puce veut prendre la religion juive... encore une idée à elle... oui je sais elle a fait croire à ses copains qu'elle était juive... car eux l'étaient...si cela l'amuse je la laisse libre... mais ça démontre aussi un dédoublement de personnalité..."
"Aujourd'hui j'ai eu la visite du juge Madre. Tu aurais rigolé, car il a eu droit à tout mon vocabulaire... il en perdait la parole (j'ai pris mon pied (sic)) A un moment il me dit "mais c'est quand même moi qui commande... Réponse de ton bibi : "Ici pédé" c'est moi ton patron". Il était vert et les flics se marraient comme des perdus."
et contre toute soumission à une quelconque forme de pouvoir ou de violence :
"Le pire que l'on puisse faire à un juge, c'est lui enlever toute autorité devant les autres et crois moi il l'a bien compris. Il était venu avec 5 anti-commandos... L'un avait la bombe de gaz à la main... au cas où? Loin d'être impressionné... cela me rend con..."
"Là ma puce je vais prendre mon lit en marche...Ton vieux voyou pose ses lèvres sur le tiennes en une douce caresse d'amour. je t'adore petite fille... car nous sommes réellement le "couple" et plus encore. Bonne nuit chaton."
Lettre autographe datée et signée d'Emile Zola, 23 lignes à l'encre noire sur une page et demie, adressée au patron de presse Arthur Meyer
Pliures inhérentes à l'envoi postal.
Emile Zola intervient auprès d'Arthur Meyer, patron du journal à grand tirage "Le Gaulois", en faveur de son ami Louis de Robert : "Vous sentirez comme moi que c'est un garçon d'avenir, et je suis convaincu que vous l'utiliserez... Je le connais et je désire qu'il travaille." en qui il reconnait un écrivain de talent : "Me permettrez-vous de vous recommander un de mes jeunes confrères Louis de Robert, dont j'ai lu les chroniques charmantes. Je crois que vous devriez l'encourager, le mettre à l'essai, car vous trouveriez en lui un excellent rédacteur pour "Le Gaulois"..."
Lettre autographe datée et signée de Charles Vildrac à Henri Barbusse ; une page à son chiffre estampé à froid en angle supérieur gauche et rédigée à l'encre noire sur un feuillet, 18 lignes.
Pliures inhérentes à l'envoi postal, une petite déchirure en pied de la lettre sans aucune atteinte au texte.
Charles Vildrac félicite Henri Barbusse pour son dévouement et son dynamisme militants : "J'ai pris connaissance du Manifeste appel pour une ligue internationale des écrivains et j'y adhère sans réserves en applaudissant à votre généreuse initiative." tout en fustigeant le mutisme ou l'indifférence de certains confrères devant la dangereuse montée des périls fascistes et nazis : "Ne pensez-vous pas que l'on pourrait solliciter l'adhésion d'une quantité d'écrivains qui se sont abstenus de toute réaction publique devant les évènements... à leur signifier notre opposition à leur attitude ?"