Encre originale dédoublée par pliage et signée dans l’œuvre « Marie-Laure », accompagnée d’une carte postale autographe signée adressée à Valentine Hugo et rehaussée de dessins et inscriptions autographes sur le dessin de la place Victor Hugo.
Superbe décalcomanie surréaliste de Marie-Laure de Noailles adressée à la peintre, modiste et photographe Valentine Hugo, la « Dame de Carreau » des surréalistes.
Au-delà de ses multiples étiquettes de muse, icône de mode, figure mondaine, célèbre mécène, écrivaine et poétesse, la vicomtesse de Noailles fut aussi un peintre accompli. Marie-Laure a produit une œuvre éclectique qui interroge l’inconscient féminin, à l’instar de sa consœur et amie Valentine Hugo. Ce dessin apparaît clairement inspiré de Rorschach mais surtout des décalcomanies surréalistes – une affinité pour cette technique qu’elle partagera avec le grand Oscar Dominguez dont elle sera l’amante jusqu’à la mort de l’artiste en 1957. Le style de cette encre préfigure ses toiles oniriques à la matière étalée, brouillée, qu’elle réalisera dans son atelier du clos Saint-Bernard à Hyères dans les années 1960.
Valentine Hugo participe aux fameuses soirées des Années Folles aux déguisements extravagants organisées par les Noailles, et figure dans le scandaleux film de Buñuel et Dali, financé par le couple de mécènes. En 1930, les deux femmes rendent possible l’impression du chef d’œuvre surréaliste de Breton et Éluard L’Immaculée Conception en achetant le brouillon et la mise au net. Valentine Hugo réalise plusieurs portraits de Marie-Laure de Noailles, dont le frontispice de son recueil de poèmes L’An quarante chez l’éditrice Jeanne Bucher.
La vicomtesse a accompagné son offrande artistique d’une carte postale autographe signée accompagnée d’un affectueux message :
« Pour ma chère Valentine, en souvenir de beaucoup de froid, de neige, et de stupidité, pour oublier la vilaine auto et se souvenir de l’éloquence d’Aragon – qui surpasse toutes les politiques et aussi pour lui dire bonjour le 29 juin 1951 avec toute ma tendresse Marie-Laure. »
Le choix d’une carte postale représentant la place Victor Hugo et son monument n’est pas anodin : Valentine Hugo vivait dans un grand appartement dont les fenêtres donnaient sur cette place portant le nom de son arrière-grand-père par alliance, dans le XVIe arrondissement. La vicomtesse a inscrit « Vive Hugo » puis « et Valentine », couronné de lauriers la statue du monument de Hugo, tracé une flèche indiquant son balcon qu’elle a rehaussé de dessins de fleurs. Même la petite fille devant le monument a reçu un petit jouet à roulettes. Laurence Benaïm raconte que la vicomtesse a plusieurs fois passé la nuit dans l’appartement de son amie pendant l’Occupation allemande : « Un soir qu’elles rentreront de chez Prunier, un garde braquera sa lanterne sur le visage de son amie. “Qui êtes-vous ! Vos papiers ! Comment vous appelez-vous ?” Et Valentine de répondre : “Comme la place” ».
Rare composition tachiste de la « vicomtesse du bizarre » (Laurence Benaïm) à l’une des figures majeures de l’avant-garde surréaliste.