Reliure éditeur en plein mouton grainé marron, tête orange, dos lisse orné de filets dorés.
Agréable exemplaire complet de son rhodoïd et de son étui.
27 mai 1894
1 juillet 1961
« Mais ils étaient trop avachis trop apeurés trop grelotteux les collabos... et trop perclus de gale aussi trop à se gratter dans tous les coins, ils pensaient qu'à bouffer... se gratter...vous regarder, voir le restaurant ils tenaient pas sur leurs tabourets...à se gratter trémousser tellement sursauter...y avait pas seulement la gale... aussi les morpions et les puces et les poux... [...] Les dénonciations elles-mêmes Raumnitz les lisait même plus...je voyais quand j'allais le soigner, il me les montrait, des paquets de papiers repliées (sic) en quatre - en huit ! J'avais vu les mecs les écrire...allant d'un grenier à l'autre pour soigner pour faire une piqûre...poser des ventouses...ils auraient bien voulu que je vois pas mais je pouvais pas faire autrement... [...] là c'était du sérieux c'était pour demander qu'on pende cette saloperie de voisin traître, et l'autre côté de la cloison qu'était non seulement vendu aux puissances ennemies de l'Allemagne et qu'allait et attenter d'un moment à l'autre à la vie du Maréchal...et à la vie d'Adolf Hitler... que c'était lui l'inventeur de la technique « terre brûlée » - qu'il était le chef du « Commando Minotaure »... que c'était lui le responsable de l'opération « Déluge » et qu'il préparait mille fois pire. C'était l'autre de l'autre côté de la cloison, le monstre... j'y allais après celui-là... j'allais le voir lui apporter la bonne parole et lui prendre la température... le thermomètre... je le plaçais moi-même... l'anus... 39°... c'était pas mérité... mais vache !...vous me croierez [sic]... il scribouillait lui aussi malgré son 39 ! oui ! et tout grelottant comme l'autre de l'autre côté de la cloison, tout comme l'autre fiévreux...crevant...et je dois dire : galeux aussi...et il écrivait pas d'amour ! non ! dénonçant de toutes les horreurs un autre crevant...un grelottant d'un grenier voisin sur autre galetas et à la lumière aussi d'une toute minuscule calebombe. J'entrais s'ils sautaient sur le billet, le chiffonnaient vite le rejetaient au loin... C'est que c'est moi qu'on arrangeait, qu'il était en train de dénoncer... C'était moi le monstre qu'il fallait qu'il soit fusillé tout de suite, que c'était pas de perdre une minute ! Que c'était le moment ou jamais en me pendant tout de suite de faire avorter l'effroyable complot. »
« Sa chambre, enfin celle du Höwen, et sa permanence étaient 2 appartements bourgeois pâles que fleurs... juste de fleurs, hortensias, fleurs fushias, azalées... (barré : toujours fraîches toujours des nouv) toujours fraîches ! toujours renouvelées ! vous vous rendez compte du luxe du sybaritisme (barré l'égoïsme) de ce [traître ?] ... ! S'il se foutait comment nous vivions nous ! L'indifférence... Y'aurait eu une mutinerie que tous les damnés réfugiés du Fidelis et des soupentes seraient montés y secouer les pots de fleurs ! (barré : y couper la tête...y enfoncer ses azalées) le cochon (barré : et les tripes et) y couper la tête...Y enfoncer dans les narines comme à un cochon plein de lauriers roses (barré : plein de cerfeuil) et plein de persil c'est tout ce qu'il aurait mérité...je trouve... Raumnitz von Raumnitz ! »
« Pour Tartre encore (barré : y'a le cas qu'il sait rien foutre) la haine s'explique il est imposteur plagiaire [...] dans ces haines les pires les plus vraiment démentielles me venaient surtout d'espèces de Tartres bons à lape, plagiaires, professeurs journalisses (barré : ah l'espèce damnée des ratés), les cracs infiniment méchants je les retrouve vingt ans après renforcés [...] par la radio et l'alcool (barré : et la politique). L'hydre a 40 têtes...mille têtes - on ne sait combien de têtes ! Vous avez quelque chose, Hercule ! Vous pensez que je suis pas de taille... ! travaux d'Hercule ? facilités ! de ce que je connais ! que de têtes ! de la hargne des politiques, des petits ratés du roman, et des anciennes petites friponnes que vous avez pas du tout cloqué (barré : mise enceinte), ni fait avorter, ni foutu au turf, et qui comptaient joliment sur votre naturel délirant pour les tourner filles de joie provoquer un de ces scandales qu'elles étaient vedette et super ! en moins d'une semaine idoles, photos grandes comme ça ! néons tout plein d'arc de Triomphe ! une publicité que Napoléon existait plus ! ni Joséphine...ni la Dame au Camélia... qu'on aurait jamais vu pareil... ni la Goulue... ni Jeanne d'Arc. [...] . Tartre a pas rien inventé, ni Paulhan, ni Hérold Paqui [sic] ni Madeleine Jacob, il faisaient tout aussi bien même mieux à Sigmaringen vous voyez mes pires crevards collabos réfugiés que je soignais, que je m'évertuais dessus jour et nuit tout fiévreux, galeux, crachant le sang. Pas besoin d'être Tartre ni Mado Jacob (barré : ou Larengon), la hargne et la haine que j'inspirais à ces pauvres gens était vraiment pas justifiée. Je mangeais moins qu'eux et je travaillais bien plus sûrement j'arrêtais pas... »
Nouvelle édition postérieure d'un an à l'originale.
Infimes éraflures marginales sans aucune gravité sur les plats, légères piqûres en pied du deuxième plat.
Précieux envoi autographe signé de Louis-Ferdinand Céline, à Micheline Deshayes du Châtelet, conclu par cette étonnante signature: "L'ogre - Ferd Céline".
Micheline Deshayes danseuse au Châtelet, est une amie de Lucette Almazor que Céline fréquente depuis 1935. Elle deviendra, après guerre, danseuse étoile et on retrouve à son propos la critique d'une de ses prestations au Grand théâtre de Reims dans le Guide du Concert de 1956: "Les deux danseurs étoiles de grande classe (...) se sont taillés un beau succès en particulier dans les préludes de Liszt où Micheline Deshayes fit admirer le fini de sa technique mise au service d'une grâce aussi sensible que légère".
La passion de Céline pour la danse et les danseuses naît en 1915 dans les Music-Hall londoniens, et devient rapidement constitutive de sa vie comme de son oeuvre. D'Elisabeth Craig, sa compagne de 1926 à 1933, dédicataire du Voyage à Lucette Almanzor (avec laquelle il se marie en 1944) et sa grande amie Karen Marie Jensen, les femmes les plus importantes de la vie de Céline sont des danseuses.
Céline témoigne régulièrement dans sa correspondance de l'importance que revêt pour lui cette forme artistique: "il m'est impossible de vivre sans la danse" et "danser tout est là - Nietzsche (si surfait) ne se trompait pas - 'je ne croirai à un dieu que s'il danse s'il raisonne ce cuistre à l'école !" (cf. cahiers de l'Herne n° 3 et 5). Dès 1933, il compose plusieurs ballets qu'il tentera vainement de faire jouer. Comme le souligne H. Godard qui y consacre un chapitre de sa biographie (Gallimard, 2011, p.222-231), la danse constitue pour Céline "un besoin existentiel (...) elle a le pouvoir d'alléger en lui la souffrance intime causée par sa vision si noire de l'homme et de la vie". Et il conclut: "les danseuses aident Céline à supporter les violences [du monde] (...) aussi bien que celles qu'elles suscitaient chez lui en retour. "Ainsi son pamphlet Bagatelles pour un massacre s'ouvre-t-il sur cette image de communion avec le monde, de "raffinement" : "Dans une jambe de danseuse le monde, ses ondes, tous ses rythmes, ses folies, ses voeux sont inscrits ! ... Jamais écrits !... Le plus nuancé poème du monde !... (...) Le poème inouï, chaud et fragile comme une jambe de danseuse en mouvant équilibre est en ligne, Gutman mon ami, aux écoutes du plus grand secret, c'est Dieu ! (...) Je ne veux plus travailler que pour les danseuses... Tout pour la danse !".
C'est au docteur Léon Gutman (alias René Gutman, "humaniste, passionné de danse (...) qui eut la rude tâche d'être l'ami juif de Céline et de Morand" cf. J. Lecarme in Albert Cohen dans son siècle p.232) que s'adresse cet éloge et c'est à lui que le narrateur demande de faire jouer ses deux ballets: "La naissance d'une fée" et "Voyou Paul, brave Virginie " dont les textes suivent. L'échec de Gutman déclenchera alors le long monologue antisémite. Mais, note J. Lecarme, à la fin du pamphlet une nouvelle intervention de Gutman dénonce le délire paranoïaque de Céline: "Tu délires Ferdinand (...) Je vais te faire interner ! (...) Ils sont tous juifs dans les asiles !... ça va bien les divertir... d'entendre ton numéro de folies... tes bêtises... (...) Tu nous fouteras la paix... tu retourneras à tes romans... si t'es sage t'auras un crayon... D'abord c'est des insanités... la race ça n'existe plus... c'est des mythes..." et Céline de conclure ces 6 pages d'"incisive" conversation par : "Gutman, il avait le dernier mot".
A cet étrange contrepoids à la violence de la narration s'ajoute une nouvelle évocation de leur passion commune : la danse avec un autre ballet de l'auteur : "Van Bagaden", dont le texte clôt le livre.
Voie de la réconciliation (impossible ?) de Céline avec le monde, c'est à travers la danse qu'il formule le terrible constat d'échec du Voyage: "On n'a plus beaucoup de musique en soi pour faire danser la vie, voilà." Mais c'est aussi la danse qui assure la fonction salvatrice de l'écriture : "Le texte [doit] être danse, se tenir toujours au bord de la mort, mais ne pas tomber dedans" (note à un de ses traducteurs, cf. H. Godard, p. 226).
Rare et précieux envoi autographe signé de Louis-Ferdinand Céline à une danseuse qui demeurera une amie jusqu'à la fin malgré les avanies de Céline.
(références bibliographiques: Henri Godard, Céline, Gallimard, 2011; Jacques Lecarme. Images de la S.D.N ches Céline et chez Cohen In Albert Cohen dans son siècle: actes du colloque international de Cerisy-la Salle).
Édition originale, un des 200 exemplaires du service de presse, le tout premier tirage et le plus court après les 23 Arches, dont 10 numérotés et avant les 219 Alfa, dont 100 numérotés.
Dos légèrement insolé en tête et en pied, trois minuscules manques en tête de la première garde qui comporte en son verso une trace d'écriture qui a été grattée.
Notre exemplaire est présenté dans un coffret signé de Julie Nadot reproduisant la couverture originale de l'ouvrage.
Rare et précieux envoi autographe signé de Louis-Ferdinand Céline à Marcel Espiau, co-fondateur et jury du prix Renaudot qui sera attribué à Céline le jour même de l'échec du Goncourt. Nous joignons une lettre inédite de remerciement adressé par Céline à Marcel Espiau.
Édition originale, un des exemplaires du service de presse.
Notre exemplaire est présenté dans un coffret signé Julie Nadot reproduisant la couverture de l'ouvrage.
L'exemplaire ayant, semble-t-il, accompagné Bardamu à travers ses violentes pérégrinations a été très habilement restauré, et certains feuillets, trop abîmés, ont été changés, ce qui était nécessaire pour préserver cet unique témoin d'une rencontre exceptionnelle et inattendue entre le Soleil et la Nuit.
Rare et précieux envoi autographe signé de Louis-Ferdinand Céline : « Hommage de l'auteur à monsieur Georges Bernanos. Louis Céline. »