S. n.|s. l. s. d. [1945]|21 x 26.50 cm
Manuscrit et tapuscrit originaux de l'article à paraître dans L'Espagne Libre, unique numéro de la Revue Actualité dirigée par Georges Bataille et Blanchot, à laquelle contribuèrent Camus, Cassou, Bataille, Grenier, Garcia Lorca, Hemingway et Quero Morales.
Manuscrit, complet présentant de nombreuses ratures, corrections et soulignements à l'encre.
Texte majeur marquant le revirement politique de Maurice Blanchot qui signe ici un texte engagé à l'opposé de ses convictions anti-républicaines d'avant-guerre.
Co-directeur de cette revue fondée par son ami Georges Bataille, Blanchot sort ainsi de son mutisme politique de l'immédiat après-guerre : « j['étais] silencieusement absent » écrira-t-il à ce propos dans Pour l'amitié.
Aux côtés des contributions « violemment démocratiques » de Camus et Cassou, L'Espoir, tout en conservant sa structure de critique littéraire, inscrit officiellement Blanchot dans cette nouvelle ligne politique humaniste dont on a pu trouver les prémices dans ses chroniques du Journal de Débats.
En consacrant son étude à cette œuvre de 1937, d'un auteur qui subit les foudres du Comité National des Ecrivains pour s'en être publiquement désolidarisé (avec Camus, Sartre et Mauriac), Blanchot refuse l'égide des nouvelles forces politiques et assume sa propre mutation.
Ainsi son regard profondément empathique à l'égard du communisme et de l'anarchisme considère cependant ces idéologies dans leurs formes premières, d'avant la catastrophe, et à une époque où il était lui-même très loin de ces accointances. Tout en affirmant la nécessité permanente de l'action révolutionnaire, il souligne le paradoxe de la pensée communiste qui se nie en se réalisant et, à l'inverse, de l'anarchisme se détruisant en refusant de se compromettre (« pas d'armée pour en finir avec l'armée. (...) vivre comme la vie doit être vécue, dès maintenant, ou décéder »).
Parallèlement à la démarche politique de Camus, Blanchot est conscient, dès 1945, de la complexité intellectuelle de toute forme d'action politique, mais il ne se contente pas de ce constat. Contraint à affronter le monde détruit et le monde à bâtir, il relève le défi d'un engagement lucide et confronte à la pensée en action, l'action en conscience : « Le parti, la guerre, la lutte, tout cela est essentiel, mais l'homme qui, dans le parti, à travers la guerre et la lutte, se cherche, cherche l'extrême de soi, cela aussi est essentiel. »
A travers une relecture messianique de cette œuvre majeure, il redéfinit la notion d'« espoir » : « l'espoir découvre maintenant l'horizon sur lequel il doit être regardé pour ne pas devenir une prison nouvelle. (...) c'est le pouvoir de choisir le destin qui est infini : les possibilités de choisir ont leurs conditions, le choix lui-même n'en a pas. (...) Et l'espoir à toujours le même nom, liberté. »
Le manuscrit, abondamment raturé et corrigé, porte la marque de l'implication de Blanchot dans ce qui deviendra un de ses combats politiques et intellectuels majeurs annonçant les prises de position du Manifeste des 121 et du projet de Revue Internationale.