Lettre autographe signée adressée à Marie Régnier : "Je songeais à notre impeccable Flaubert en vous lisant, et je me promettais d'être sévère comme il l'aurait été, pour vous montrer que je vous traite en homme."
Médan 7 décembre 1882|13.20 x 21.60 cm|3 pages sur 3 feuillets
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Lettre autographe signée d'Emile Zola adressée à Marie Régnier, trois pages rédigées à l'encre noire sur trois feuillets. Pliures transversales inhérentes à la mise sous pli et infime déchirure sans manque en marge basse du premier feuillet. Belle est longue lettre autographe d'Emile Zola adressée à l'écrivaine à l'occasion de la sortie de son roman La Couleuvre. Auteur prolifique mais également critique reconnu, Emile Zola répond à une sollicitation d'avis de la part de sa consœur : « J'achève La Couleuvre et je veux vous dire quelques mots bien francs, à la volée de la plume, encore sous l'impression chaude de la lecture. » A la manière d'un professeur, il distribue les notes et les commentaires : « La première partie me va tout à fait : il y a là une étude servie, de l'analyse exacte [...] Ensuite, l'étude me paraît se perdre un peu dans la thèse » Mais cette lettre est surtout l'occasion pour Zola de rappeler l'essence même du naturalisme : la description de la société appuyée sur un travail minutieux de recherche et de documentation : « j'estime que votre rôle est simplement d'apporter des documents. Or, vos documents sont réfutables... » Véritablement obsédé par ces fameux « documents » grâce auxquels il constituait des dossiers colossaux destinés à la rédaction de ses romans, Zola confirme ici l'héritage du réalisme, invoquant la mémoire de Flaubert disparu deux années plus tôt : « Je songeais à notre impeccable Flaubert en vous lisant, et je me promettais d'être sévère comme il l'aurait été, pour vous montrer que je vous traite en homme. » Marie Régnier fut une familière de Gustave Flaubert avec lequel elle échangea une vaste correspondance ; l'écrivain rouennais donnait à sa pupille de nombreux conseils littéraires. Emile Zola prend dans cette lettre le relai de son défunt maître craignant, malgré la longue énumération de critiques qu'il émet, son ton peut-être trop dur : « Et voilà mon cœur soulagé, je n'ai plus qu'à être aimable. » Soucieux de ne pas paraître trop catégorique il ajoute : « ...mais encore peut-être est-ce moi qui me trompe, en exigeant chez tout le monde la formule que j'aime chez moi et chez mes amis. » Très belle lettre du chef de file du naturalisme, empreinte de rigueur mais aussi pleine d'estime, témoignage des timides prémices de la reconnaissance des femmes en littérature par leur pairs.