Édition originale.
Reliure en plein maroquin rouge, dos rond à cinq nerfs ornés de fleurons dorés, légers frottements sur les coiffes, double encadrement de filets dorés à froid sur les plats, avec des fleurons aux angles de l’encadrement intérieur, coins légèrement émoussés, gardes et contreplats de papier marbré, tranches et chasses dorées, très élégante reliure du XIXe à la Du Seuil signée Quinet sur la première garde.
Rare édition originale du premier succès théâtral de Marivaux. Cette pièce, représentée au printemps 1722 avant d’être publiée l’année suivante en 1723, contient déjà toute l’essence du marivaudage, toute sa galanterie subtile. Selon le poète romantique Théophile Gautier, elle serait même son chef-d’œuvre.
Lorsque le dramaturge soumet son œuvre aux « comédiens italiens de son Altesse Royale Monseigneur le Duc d’Orléans », qui jouissent de la protection du régent depuis 1716, le chef de troupe du « nouveau Théâtre Italien », l’acteur de renom « Riccoboni dit Lelio », est en train de délaisser le théâtre de farce pour des pièces plus abouties. Dix-neuf représentations seront données par les acteurs italiens des pièces de Marivaux, au cours desquelles ils privilégieront un style de jeu plus naturel que codifié.
Une comédienne en particulier, Giovanna-Rosa Benozzi, connue sous le nom de Silvia, excelle à cette époque dans cet art. Elle est préférée par ses contemporains « à la brune Quinault, à la blonde Balicourt, à la belle Clairon, à la jeune Gaussin, toutes de la Comédie-Française ». Sa rencontre avec Marivaux eut lieu après la première de La Surprise de l’amour. L’échange quelque peu inhabituel entre les deux protagonistes fut rapporté par le biographe Gaston Deschamps. Le dramaturge se rendit anonymement dans les coulisses pour féliciter la grande actrice. Face à son admirateur inconnu, Silvia se plaignit de « ne point saisir toute la finesse de son rôle ». Marivaux récita quelques lignes de son œuvre, auxquelles la comédienne répondit avec une grande admiration : « Vous êtes le diable ou vous êtes l’auteur ».
Selon le marquis d’Argenson, les comédies de Marivaux « pourraient presque toutes être appelées La Surprise de l’amour ». Cette appréciation, légèrement ironique, vient cependant confirmer le jugement de Théophile Gautier. En effet, cette sixième pièce de Marivaux, constitue la véritable matrice de son œuvre à venir et du célèbre marivaudage qui culminera en 1730, avec le Jeu de l’amour et du hasard.
Très rare exemplaire dans une très belle reliure à la Du Seuil, signée par un maître relieur du XIXe.