Lettre autographe signée de Charles Péguy adressée à René Baschet : "Je vois, Monsieur, qu'en somme ce Mystère de la charité de Jeanne d'Arc a failli avoir le grand prix de littérature"
Vendredi 21 juillet 1911|27 x 21 cm|une feuille
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⬨ 73830
Lettre autographe signée de Charles Péguy adressée à René Baschet, directeur de la revue l'Illustration, 27 lignes à l'encre noire sur deux feuillets contrecollés en marge, papier à en-tête des Cahiers de la Quinzaine, traces de pliure inhérentes à la mise sous pli de la lettre, traces d'adhésif au dos du second feuillet, légère insolation en marge inférieure sans atteinte au texte. Longue lettre sur sa déception de n'avoir pas reçu le grand prix de littérature de l'Académie Française pour son drame médiéval Le Mystère de la charité de Jeanne d'Arc : "Je vois, Monsieur, qu'en somme ce Mystère de la charité de Jeanne d'Arc a failli avoir le grand prix de littérature ; qu'il avait été proposé en première ligne par la commission ; qu'une cabale soulevée au dernier moment par M. Lavisse m'a seule fait échouer ; que ce débat avait fait beaucoup de bruit à l'Académie et dans le public ; que ce bruit est à peine apaisé ; qu'il va recommencer aussitôt la rentrée quand paraîtra le deuxième mystère. Je vois d'autre part que je n'en ai point d'exemplaire en librairie et je me demande si avant d'en faire des réimpressions il n'y aurait point place pour le donner en supplément dans l'Illustration. J'étais allé vous en parler un matin de l'autre semaine, en montant chez les Tharaud. Je suis en pourparlers avec plusieurs éditeurs pour en faire un volume à la rentrée. Je vous demanderai, Monsieur, si en principe cette proposition vous paraît présenter quelques intérêts, de vouloir bien me faire indiquer un rendez-vous. Vous savez beaucoup mieux que moi que c'est en ce moment que sont arrêtées les rentrées de revues et des éditeurs." Cette échec résulterait selon Péguy de son conflit avec l'historien Ernest Lavisse, qu'il avait plusieurs fois critiqué car il l'accusait d'être plus au service de la politique que de la science : "Parmi ces livres, un des plus intéressant était la petite Histoire de France de M. Lavisse, où il y avait des images, des récits et un texte. Je pris là de la France et de son histoire une image commode que tout mon travail a consisté depuis à essayer de remplacer par l'incommode image exacte." L'année 1911 fût une suite de déceptions pour Charles Péguy ; en plus des mauvaises critiques, il essuya plusieurs revers avec le prix Goncourt et le Prix de la vie Heureuse (futur Prix Fémina). Dans une lettre écrite quelques temps après à son ami Charles Lucas de Pesloüan, il avoue le désespoir de sa situation "Je travaille tout le temps, tous les jours, je me sauve ainsi de descendre plus profondément". Les lettres autographes de Charles Péguy sont rares et recherchées.