Première édition sous ce titre avec les illustrations de Saint-Exupéry, un des 20 exemplaires numérotés sur Madagascar, tirage de tête. Parue quelques jours après l’édition originale sans illustrations, publiée chez Gallimard (Lettres de jeunesse 1923-1931).
Ouvrage illustré de 10 dessins en couleurs d’Antoine de Saint-Exupéry ainsi qu’une vignette de couverture aussi d’après un dessin de l’auteur.
L’ouvrage est enrichi d’un exceptionnel dessin au crayon bleu et rouge d’Antoine Saint-Exupéry sur un papier filigrané avec une inscription au crayon au verso « Donné à Léon Werth [dédicataire du Petit Prince] ». Pli horizontal et infime décharge de rouille en partie inférieure, sans atteinte au dessin.
Bien que Léon Werth n’ait jamais attaché de valeur aux éditions bibliophiliques des œuvres de son cher ami, il a vraisemblablement gardé avec révérence cet exemplaire en grand papier, comme il l’avait fait avec ceux personnellement reçus de l’auteur. Ces livres avaient bravé avec lui l’exode et les persécutions antisémites :
« Je n’ai qu’un souci c’est d’emporter Terre des hommes. Non pas parce que cet exemplaire est de luxe, de haut
luxe. Je n’ai qu’un maigre respect pour les belles éditions. Mais parce que Saint-Exupéry me l’a donné, parce que le beau papier, les pages non rognées ne sont pas richesse et vanité, mais amitié. » (33 jours, Paris, Éd. Viviane Hamy, 1992, p. 48)
C
Cette belle tradition des « pages d’amitié » semble être perpétuée ici par Werth, qui a sans doute reçu un exemplaire de tête offert par l’éditeur en l’honneur de son ami disparu.
Faute de dédicace, il aurait ajouté ici un cadeau graphique de l’auteur du Petit Prince à cette édition posthume de la correspondance de Saint-Exupéry avec Rinette (Renée de Saussine) la sœur d’un de ses camarades au lycée Saint-Louis. Le personnage de ce croquis est par ailleurs assez proche stylistiquement des « dessins pour Rinette » au crayon bleu et rouge qui figurent en illustration de ce même ouvrage. On y retrouve l’habituelle silhouette zoomorphe faite de traits décisifs, marquée par une touche de rouge vif et affublée d’une cravate – pratique courante chez Saint-Exupéry qui s’amusait à créer des personnages fantastiques aux proportions étranges, portant souvent des cols de manteau, nœuds papillon, et autres cravates, prémices de la fameuse écharpe du Petit Prince.
Des croquis de camarades de caserne que le jeune conscrit réalise à Casablanca lors de son service militaire aux aquarelles du Petit Prince, la vie de Saint-Exupéry est rythmée par cette activité marginale mais omniprésente, le dessin. Sur les lettres à ses amis, dans les marges de ses manuscrits, en tête de ses livres offerts, sur les télégrammes reçus, les factures, les nappes, les prospectus, sur tout ce qui lui passe par la main et offre un support à son imaginaire, Saint-Exupéry dessine, esquisse, caricature, croque, illustre, invente, griffonne des êtres vivants ou imaginaires, des amis et des amies. Hormis ceux réalisés en marge de lettres et manuscrits ou offerts à des proches, la plupart de ses dessins antérieurs à son exil américain furent jetés par Saint-Exupéry.
Exemplaire en tirage de tête de cette importante correspondance de jeunesse accompagné d’une précieux dessin coloré et contrasté de Saint-Exupéry offert au dédicataire du Petit Prince.