Lettre autographe signée de Lucette Destouches à Henri Mahé et son épouse, datée du 9 avril [1947] à Copenhague, 37 lignes à l'encre bleue sur un feuillet de vergé.
Mouillure dans la partie supérieure de la lettre, sans affectation de la lecture du texte, le coin supérieur droit déchiré, réparé d'un papier adhésif, deux petites déchirures, une en tête, l'autre sur la droite au niveau des pliures.
Émouvante lettre de la main de Lucette Destouches, infatigable compagne de Céline, où transparaissent les peines intimes du couple exilé.
Exacerbée par la solitude, la douleur de Lucette d'être restée sans enfant est au centre de cette lettre adressée aux époux Mahé, confidents privilégiés des Destouches dans leur isolement : « C'est un si grand vide de vivre aussi sans enfant... mais leur faire suivre le calvaire serait trop cruel ! » La lettre rend compte de l'ampleur de l'épuisement qui s'abat sur les exilés, que peut adoucir le marrainage de la fille aînée de Mahé, Marine : « Ce rôle de marraine est je le sens le seul qui puisse encore me donner la notion de vivre... on ne peut être plus écartelés que nous le fumes... ». Ce lien, vital aux reclus, dépasse le simple attachement à la famille Mahé et englobe le groupe d'amis bretons chers aux Destouches, rassemblés autour d'Augustin Tuset, le « bon Docteur », lui-même parrain de Marine Mahé. Révélateur de l'arrachement à la vie d'autrefois que représente l'exil, le ton de la lettre est partagé entre espoir et fatalisme : « En devinez-vous l'immense réconfort cette liaison au passé dont la privation nous dessèche l'âme... Il me semble que nous avons gravis tous des marches de si pénibles... Est-ce la fin ? »