Edition originale illustrée de 8 planches et diagrammes (certains dépliants) et de deux volvelles. Traduction du latin par Robert le Toul, sieur de Vassy.
Reliure postérieure (XIXème siècle) en plein veau brun. Dos lisse orné de filets, guirlandes et fleurons dorés, plats richement ornés d'une grande plaque à froid figurant des rosaces, filet doré en encadrement de ces plaques, filet doré sur les coupes, toutes tranches mouchées. Coiffes et mors habilement restaurés, première garde presque entièrement détachée.
L'ouvrage est divisé en quatre parties : Dialectique ou logique nouvelle ; L'Art bref de M. Raymond Lulle ; Traicté de M. Raymond Lulle et Le Petit œuvre ou traicté de l'ouyr cabalistique ou l'introduction à toutes les sciences.
L'auteur se donne pour but de mener chacun à la connaissance universelle au moyen d'une nouvelle logique de "stylisation didactique" des sciences qui se veut exhaustive. Dans cette optique, il met en place des mécanismes de synthèse grâce à des diagrammes et des volvelles, des concepts représentés par des lettres et des combinaisons de lettres. Lulle a ainsi pour ambition de réduire toutes les sciences connues de son temps à une seule.
Il s'agit donc de philosophie de la logique analogique appliquée à la science.
Cette méthode est très justement décrite par le Père Yves de Paris (1588-1678), apologète et moraliste capucin et admirateur de Raymond Lulle : « Les principes de Lulle sont abstraits, ils sont universels ; si on les applique à toutes choses, toutes choses, par conversion, peuvent leur être appliquées ; simples ils peuvent s'appliquer aux choses simples, complexes aux choses complexes. Ainsi toute proposition peut être ramenée à une combinaison de termes, et s'il en est ainsi j'aurai l'encyclopédie des sciences parce que si la théologie, la médecine, la jurisprudence, la politique sont ramenées à un seul principe, elles concorderont également : deux choses semblable à une troisième sont semblables entre elles » (Charles Chesneau, Le Père Yves de Paris en son temps, volume 2, Paris, 1946, pp.44-45).
Raymond Lulle (ou Ramon Llull en catalan, 1232-1315) a endossé de multiples fonctions au cours de son existence : philosophe, poète, théologien, missionnaire, apologiste, écrivain mystique ou encore romancier. A trente ans, à la suite d'une révélation divine lui dictant de convertir les infidèles au christianisme, il abandonne femme et enfants et met un terme à sa carrière de poète-troubadour. Il se consacre alors à l'élaboration de son système d'évangélisation par l'éducation et le savoir, qu'il nomme lui-même « L'Art ». Véritable pédagogue, Raymond Lulle s'illustre par sa constante volonté de toucher toutes les intelligences, chrétiennes ou non. Ayant à cœur de s'adresser à chacun dans sa langue naturelle, « l'illuminé » se consacre pendant neuf ans à l'apprentissage de la langue arabe dans laquelle il rédige son premier grand ouvrage le Livre de contemplation de Dieu (1273-1274), qu'il traduit ensuite en latin et en catalan. Maitrisant de nombreux dialectes, il rédige ses textes philosophiques, religieux et techniques principalement en Catalan, mais aussi en castillan, en occitan, en français, en italien, et en néo-latin. Lulle fut ainsi un pionnier de la vernacularisation du savoir, en employant le catalan, langue populaire, pour traiter de thèmes réservés à la langue savante, le latin. Aujourd'hui encore considéré comme le père du catalan littéraire, tout son œuvre écrit a fortement contribué à fixer les bases du catalan écrit et à enrichir son lexique. Il demeure l'un des tous premiers auteurs catalans et l'une des figures emblématiques du Moyen-âge. Grand instigateur de la conversion des Musulmans au christianisme, il fut béatifié en 1419 et devint une figure majeure de l'hagiographie catalane.