Gravure originale in folio, extraite du Voyage dans la Basse et la Haute Egypte de Vivant Denon.
Planche composée de 2 vues ainsi décrites par l'auteur:
N° 1. Vue de Bénécé ou Bhéneséh , sur le canal appelé le Bar-Juseph, l'antique Oxyrynchus, capitale du trente-troisieme nome, citée par les premiers catholiques comme une ville considérable ; elle a donné son nom à un poisson particulier à l'Égypte, ou en a reçu le sien : ce poisson d'une forme très extraordinaire est un de ceux qui composent la superbe collection des animaux du Nil qu'a peints avec autant de vérité que de talent le citoyen Redouté, membre de l'institut du Caire.
La triste vue de Bénécé a cela de particulier qu'elle offre l'aspect de la marche des sables sur les villes et villages : la partie de droite de l'estampe a été habitée, et a disparu ; celle où est la colonne est presque enfouie ; celle où est le minaret est déja abandonnée ; celle à gauche , où il y a deux oiseaux, est le village moderne, qui semble se retirer et fuir devant le désert qui marche sur lui.
Le N° 2 est la vue d'une ruine, qui paroit être celle de l'angle d'un grand portique d'ordre composite, dont il ne reste qu'une colonne et une partie de l'architrave : je n'avois point de moyens de mesurer la hauteur de la colonne, mais son diametre au quart du fût, à son départ des sables qui l'enfouissent, est de quatre pieds et demi ; il en reste sept assises de visibles , de quarante pouces chacune. Cet édifice en pierres étoit d'un travail médiocre ; le chapiteau en est lourd, quoique privé de ses feuilles et de ses volutes, ce qui doit le faire juger romain, et postérieur à Dioclétien, c'est-à-dire du temps de la décadence de l'architecture.
Rousseurs, sinon bel état de conservation.
Publié pour la première fois en deux volumes, dont un atlas de gravures, chez Didot, en 1802, le 'Voyage dans la Basse et la Haute Égypte' connut un tel succès qu'il fut traduit dès 1803 en Anglais et en Allemand, puis quelques années plus tard en Hollandais et en Italien, notamment. Presque toutes les planches sont dessinées par Denon, qui en a aussi gravé lui-même un petit nombre, notamment des portraits d'habitants d'Egypte, qui ont encore gardée toute la fraîcheur d'esquisses prises sur le vif (nos 104-111). Une bonne vingtaine de graveurs ont également collaboré à la création des eaux-fortes dont Baltard, Galien, Réville et d'autres.
Dominique Vivant, baron Denon, dit Vivant Denon, né à Givry le 4 janvier 1747 et mort à Paris le 27 avril 1825, est un graveur, écrivain, diplomate et administrateur français. A l'invitation de Bonaparte, il se joint à l'expédition d'Egypte en embarquant dès le 14 mai 1798 sur la frégate " La Junon ". Protégé par les troupes françaises, il a l'opportunité de parcourir le pays dans tous les sens, afin de rassembler le matériau qui servit de base à son travail artistique et littéraire le plus important. Il accompagne en particulier le général Desaix en Haute Egypte, dont il rapporte de très nombreux croquis, lavis à l'encre et autres dessins à la plume, à la pierre noire, ou à la sanguine. Il dessine sans relâche, le plus souvent sur son genou, debout ou même à cheval, et parfois jusque sous le feu de l'ennemi. A l'issue d'un voyage de 13 mois durant lesquels il dessine plusieurs milliers de croquis, Vivant Denon rentre en France avec Bonaparte, et devient le premier artiste à publier le récit de cette expédition. Les 141 planches qui accompagnent son Journal retracent l'ensemble de son voyage, depuis les côtes de la Corse jusqu'aux monuments pharaoniques de la Haute Egypte. Bonaparte le nomme ensuite directeur général du musée central de la République, qui devient le musée Napoléon, puis le musée royal du Louvre et administrateur des arts. En 1805, Vivant Denon relance le projet de la colonne Vendôme, qui avait été suspendu en 1803. Il organise ensuite des expéditions dans toute l'Europe impériale pour amasser les objets d'art, qui sont pillés pour être emportés au Louvre. En 1814, Louis XVIII le confirme à la tête du Louvre, dont une aile porte encore son nom aujourd'hui. Il est considéré comme un grand précurseur de la muséologie, de l'histoire de l'art et de l'égyptologie.