Gravure originale in folio, extraite du Voyage dans la Basse et la Haute Egypte de Vivant Denon.
Planche composée de deux vues ainsi décrites par l'auteur:
N° 1. Femme d'Égypte dans le harem. J'ai dessiné celle-ci d'après nature ; voyez dans le journal, tome I, page 148, la circonstance qui m'en a fourni l'occasion : elle est assise à l'angle d'un divan, coiffée, et couverte de schals ; près d'elle est un éventail de plumes, et ses sandales au bas du divan.
N° 2. Vue de Cosséir, prise du nord au sud, avec la triste vue des stériles côtes de la mer Rouge (1). A gauche, sur le devant, on voit les ressifs qui forment la rade de Cosséir, et la défendent des vents du nord nord-ouest, et dans le fond, le cap qui l'abrite au sud sud-est. Cette plage, toute de nouvelle formation, n'est composée que de madrepores , dont la plupart sont énormes ; sa couleur blanche , réfléchie par le soleil, en rend l'aspect difficile à soutenir. Ce que l'on appercoit sur le premier plan sont des établissements arabes ; ils sont composés de quelques morceaux de bois soutenant de mauvaises nattes, sous lesquelles de malheureux habitants vivent de coquillages , dont les débris forment tous les ustensiles de leur ménage : j'y ai trouvé des coffres assez curieux faits d'écailles de tortues ; mais ce que l'on ne peut ni peindre ni décrire, c'est la triste austérité du pays, c'est le rigide aspect du sol, et l'insupportable reflet de l'ardeur du soleil sur la blancheur de cette plage : en voyant des êtres s'agitant sur ce point, et y formant des établissements, on peut prendre une idée de ce que l'avarice peut faire braver de privations pour obtenir le superflu.
(1) II s'est glissé une erreur dans l'annonce du titre de ce n° : lisez, Vue de Cosséir, et des côtes de la mer Rouge.
Quelques rousseurs, un léger accroc angulaire, une déchirure marginale habilement restaurée à l'aide d'un morceau de filmoplast, sinon bel état de conservation.
Publié pour la première fois en deux volumes, dont un atlas de gravures, chez Didot, en 1802, le 'Voyage dans la Basse et la Haute Égypte' connut un tel succès qu'il fut traduit dès 1803 en Anglais et en Allemand, puis quelques années plus tard en Hollandais et en Italien, notamment. Presque toutes les planches sont dessinées par Denon, qui en a aussi gravé lui-même un petit nombre, notamment des portraits d'habitants d'Egypte, qui ont encore gardée toute la fraîcheur d'esquisses prises sur le vif (nos 104-111). Une bonne vingtaine de graveurs ont également collaboré à la création des eaux-fortes dont Baltard, Galien, Réville et d'autres.
Dominique Vivant, baron Denon, dit Vivant Denon, né à Givry le 4 janvier 1747 et mort à Paris le 27 avril 1825, est un graveur, écrivain, diplomate et administrateur français. A l'invitation de Bonaparte, il se joint à l'expédition d'Egypte en embarquant dès le 14 mai 1798 sur la frégate " La Junon ". Protégé par les troupes françaises, il a l'opportunité de parcourir le pays dans tous les sens, afin de rassembler le matériau qui servit de base à son travail artistique et littéraire le plus important. Il accompagne en particulier le général Desaix en Haute Egypte, dont il rapporte de très nombreux croquis, lavis à l'encre et autres dessins à la plume, à la pierre noire, ou à la sanguine. Il dessine sans relâche, le plus souvent sur son genou, debout ou même à cheval, et parfois jusque sous le feu de l'ennemi. A l'issue d'un voyage de 13 mois durant lesquels il dessine plusieurs milliers de croquis, Vivant Denon rentre en France avec Bonaparte, et devient le premier artiste à publier le récit de cette expédition. Les 141 planches qui accompagnent son Journal retracent l'ensemble de son voyage, depuis les côtes de la Corse jusqu'aux monuments pharaoniques de la Haute Egypte. Bonaparte le nomme ensuite directeur général du musée central de la République, qui devient le musée Napoléon, puis le musée royal du Louvre et administrateur des arts. En 1805, Vivant Denon relance le projet de la colonne Vendôme, qui avait été suspendu en 1803. Il organise ensuite des expéditions dans toute l'Europe impériale pour amasser les objets d'art, qui sont pillés pour être emportés au Louvre. En 1814, Louis XVIII le confirme à la tête du Louvre, dont une aile porte encore son nom aujourd'hui. Il est considéré comme un grand précurseur de la muséologie, de l'histoire de l'art et de l'égyptologie.