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Jean-Paul SARTRE Manuscrit inédit sur l'idéologie bourgeoise et la Révolution française

4 500 €

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Jean-Paul SARTRE

Manuscrit inédit sur l'idéologie bourgeoise et la Révolution française

s.d. (1952), 12 feuillets.


Manuscrit autographe de 12 pages sur feuillets à carreaux, rédigé à l'encre bleue, nombreux passages soulignés.
Ensemble de réflexions inédites de Jean-Paul Sartre portant sur la structure sociale et l'idéologie bourgeoise écrites probablement en 1952 dans le cadre d'un projet de scénario sur la période révolutionnaire. Cette série de dialogues intérieurs sur la nature du pouvoir individuel et collectif constituent une première ébauche des idées développées dans son chef-d'œuvre de 1960, la Critique de la raison dialectique. à travers l'exemple de la Révolution française et de la Terreur, Sartre s'interroge sur le rôle du citoyen et de la propriété en invoquant les écrits de Kant, Marx, Rousseau, Hobbes, Saint Paul et Luther.
Cet ensemble de feuillets présente de nombreuses similarités dans son contenu et sa forme avec deux manuscrits antérieurs à 1953 et aujourd'hui conservés à l'Université d'Austin, Texas (manuscrit « Liberté – Egalité », fonds Harry Ransom Humanities Research Center) et à l'Université d'Ottawa (manuscrit « Scénario / Joseph Le Bon »). Une référence dans notre manuscrit à une étude de Jean Vialatoux sur Hobbes, rééditée en 1952, corrobore davantage sa datation dans le courant de cette année.
On reconnaît à travers ces feuillets le style de notation sartrien, composé d'affirmations et de notes fulgurantes s'attaquant aux systèmes et structures sociales : « car le bourgeois ne peut tirer son sacré que de lui-même », « On est sacré en tant qu'esclave du souverain qui défend chacun de ses esclaves contre les autres esclaves ». C'est l'occasion pour le philosophe de déployer de nombreux raisonnements et syllogismes, ainsi que pour le lecteur de suivre en détails son cheminement intellectuel :
« Qu'est-ce que donc que le souverain par rapport à moi ? 1/ Ma propre volonté mais aliénée. On me la renvoie comme autre. C'est-à-dire que je la réintériorise sous la forme de commandement, de devoir et de loi. Ex : je possède et cultive ma terre. Je donne mon droit au souverain. Il me confirme dans cette possession ».
Au travers d'une série de mises à l'épreuve d'affirmations idéologiques, Sartre analyse le phénomène de la dévolution du pouvoir et la place de la volonté individuelle, et déconstruit ainsi la mystique de l'État dont Hobbes s'est fait le chantre.
Le début des années 1950 correspond à une période de grande productivité de l'écrivain, qui créée au théâtre sa scandaleuse pièce Le diable et le bon dieu et se mobilise pour la libération d'Henri Martin, condamné à la suite de son action contre la guerre d'Indochine. En 1952, il se consacre à des projets biographiques avec la publication de son Saint Genet et débute également la rédaction d'un scénario resté inachevé sur la vie d'un révolutionnaire méconnu, le montagnard Joseph Le Bon, destiné à être « une sorte de biographie philosophique filmée qui repensait les données mises en avant par l'historiographie de la Révolution » (Philippe Gilles, Construction du personnage et argumentation philosophique (sur un scénario inédit de Jean-Paul Sartre)) dont les ébauches sont aujourd'hui conservées à l'Université d'Ottawa et d'Austin.
Ces notes manuscrites font probablement partie d'un ensemble de réflexions préalables à la rédaction de ce scénario, de larges passages étant consacrés à une approche anthropologique et particulièrement novatrice de la Terreur ayant pour but de comprendre l'apparition de la violence dans l'Histoire (dans le manuscrit le « germe de la Terreur ») :
« Il y a terreur quand le pessimisme se change en optimisme sans que la conception originelle de l'homme soit changée. Là alors le Mal devient une broussaille parasitaire à écarter pour retrouver le bien. Le Mal est niant. Si non partons de l'idée que l'Homme est métaphysiquement mauvais par suite d'un acte libre sur lequel on ne peut revenir, il y a pessimisme et non terreur. »
Au-delà de la période révolutionnaire abordée en quelques pages, ce manuscrit reflète les préoccupations et le débat interne sous-jacent de la philosophie sartrienne, entre individuel et collectif, réel et idéel, souverain et masses. En effet, ces notes portent en germe les thèmes principaux de la Critique de la raison dialectique, sa monumentale étude qui après L'Etre et le Néant assure le volet social de sa pensée et demanda de nombreuses années de maturation. Dans le manuscrit datant de quelques années avant sa publication, se trouve la même démarche visant à créer une anthropologie d'inspiration marxiste, alors que Sartre se rapproche progressivement du PCF après une longue période de désaveu et signe la même année sa série d'articles élogieux dans les Temps modernes, intitulée « Les communistes et la paix ». Véritable « archéologie » de la dialectique sociale, ces notes reprennent et confrontent avec grand sens critique les théories de ses aînés, Rousseau et Hobbes en tête :
« N'oublions pas que le système de Hobbes est engendré par la peur (la peur est ma passion dit-il). Il réclame la paix. Mais la paix civile (contre la guerre civile). Il s'agit donc de vivre en sécurité. ‘N'avoir rien à craindre des autres hommes, acquérir sans rivaux, conserver sans envieux'. La paix mercantiliste du bourgeois anglais ».
On remarque l'influence nettement plus positive qu'exerce le Contrat social, cité à plusieurs reprises et dont le marxisme lui-même est largement redevable : « Mais chez Rousseau la somme des actes d'engagement se fait à un être d'abord purement fictif et non existant mais qui « à l'instant (du pacte) » nait reçoit son unité, son moi commun, sa vie, sa volonté ». Par ailleurs, Sartre insiste avec beaucoup de force sur l'assouvissement des masses et la passivité qui semblent être les immuables conditions de la dialectique sociale qu'il condamne :
« C'est que la personne du Monarque (ou de l'assemblée) étant aussi une personne individuelle ne peut pas s'identifier à une pure volonté du général. Sans doute elle incarne les volontés de tous mais elle est aussi volonté d'un seul. Et comme telle elle peut aller me chercher dans ma particularité et ma vie comme telle. Si je m'aliène à une personne, je suis esclave. »
Ces notes de travail en vue d'un projet cinématographique inachevé s'avèrent également d'une importance capitale pour la génétique de l'œuvre philosophique sartrienne, par leur parenté explicite avec la Critique de la raison dialectique. Aux confins de la sociologie et la philosophie, ces pages de Sartre encore inédites comblent les lacunes de la philosophie marxiste et jettent les bases mêmes d'une nouvelle anthropologie.
 

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