Antoine de SAINT-EXUPERY
Terre des hommes
Nrf, Paris 1939, 12x19cm, broché.
Édition originale, un des exemplaires du service de presse.
Important et exceptionnel envoi autographe signé d'Antoine de Saint-Exupéry à Vicente Almandos Almonacid : « Pour le capitaine Almonacid héros de l'aviation argentine et française avec l'affection profonde d'Antoine de Saint-Exupéry. »Bel exemplaire.
« J'ai toujours, devant les yeux, l'image de ma première nuit de vol en Argentine, une nuit sombre où scintillaient seules, comme des étoiles, les rares lumières éparses dans la plaine. Chacune signalait, dans cet océan de ténèbres, le miracle d'une conscience. » (
Terre des Hommes)
Vicente Almandos Almonacid et Saint-Exupéry se sont connus en octobre 1929, lorsque ce dernier fut affecté en Argentine pour y développer de nouvelles lignes aériennes en tant que « jefe de tráfico » de l'Aeroposta Argentina. C'est en grande partie grâce à Almonacid que naquit la grande aventure aéronautique française en Argentine.
Véritable héros de l'aviation argentine, Almonacid doit à la France son talent et ses premiers succès. C'est en effet en France que le jeune étudiant argentin découvre l'aviation et devient, sur un malentendu, un prodige dès son premier vol. Se retrouvant par erreur aux commandes d'un avion alors qu'il n'a jamais appris à voler, il cale avant l'atterrissage et se pose en vol plané sous les regards admiratifs des autres pilotes. Lorsqu'éclate la guerre de 1914, il s'engage dans la Légion étrangère avant d'être réaffecté à l'aéronavale par son ami Gustave Eiffel. Décoré de la médaille militaire et de la Croix guerre pour son audace et ses exploits, il rentre en Argentine en 1919 auréolé de gloire et deviendra ensuite un véritable héros national en traversant la cordillère des Andes de nuit avec le S.P.A.D que lui avait offert l'armée française.
Ainsi fut il le principal soutien et collaborateur argentin de Pierre-Georges Latécoère, lorsque le pionnier de l'aviation commerciale vint faire le pari de relier cet immense pays aux conditions météorologiques extrêmes par les airs.
Véritable Mermoz argentin, Almonacid plut immédiatement à Saint-Exupéry et, ensemble, ils partagèrent l'incroyable combat contre les éléments, pour relier Buenos Aires et la Terre de Feu.
Les souvenirs de ces deux années en Argentine constitueront une des principales sources de
Terre des hommes. C'est ici que se déroule le récit de Guillaumet « auteur de [s]on propre miracle » et sa superbe conclusion : « Ce que j'ai fait, je te le jure, jamais aucune bête ne l'aurait fait. ». Saint-Exupéry y décrit également les exploits andins de Mermoz et sa disparition dans l'Atlantique Sud entre Toulouse et Buenos Aires.
Mais c'est sans doute par le récit de sa lutte contre un typhon au-dessus de la « terre bosselée comme un vieux chaudron » de Patagonie, constituant le dernier chapitre de
Terre des hommes, que Saint-Exupéry rend le plus bel hommage à l'héroïsme de son ami, pionnier de cette inhumaine lutte entre « le pilote et les puissances naturelles » sur la ligne aérienne la plus australe du globe. C'est d'ailleurs du récit de cette aventure sud-américaine que le chef-d'œuvre de Saint-Exupéry tire son titre : « Je serai ému demain peut-être, quand j'embellirai mon aventure en m'imaginant, moi vivant, moi qui marche sur la terre des hommes, en perdition dans le cyclone. »
Superbe exemplaire célébrant, l'héroïsme du « Condor de la Rioja » et témoignant, dix ans après leur aventure commune, de l'indéfectible amitié qui unit ces « camarades » du ciel.