Maurice BLANCHOT
Le pèlerinage aux sources - Manuscrit autographe et tapuscrit complets.
S.n. [Journal des débats], s.l. [Paris] s.d. (1944), 13,5x21,5cm & 2 pages in-4, 2 1/2 pages in-8.
Manuscrit autographe de l'auteur de 2 pages et demie in-8 publié dans le numéro du 13 janvier 1944 du
Journal des Débats.
Manuscrit recto-verso complet, à l'écriture très dense, comportant de nombreux ratures, corrections et ajouts.
On joint le tapuscrit complet, avec une correction autographe à l'encre noire.
Chronique parue à l'occasion de la publication de
Le pèlerinage aux sources de Joseph Lanza del Vasto.
Cette chronique de Maurice Blanchot fait un étonnant écho à l'un de ses tout premiers textes publiés (1931), consacré aux
Mémoires de Gandhi, et qui contenait déjà l'essentiel de sa pensée des années 1930. Publié dans les pages des
Cahiers mensuels, revue catholique proche de la pensée de Jacques Maritain, Blanchot y défendait l'idée d'une révolution nécessairement spirituelle mais aussi d'une lutte contre l'impureté des influences étrangères.
Dans « Le pèlerinage aux sources », Blanchot revient à Gandhi par le biais d'un ouvrage de Joseph Lanza del Vasto récemment paru, dans lequel le philosophe italien analyse
« l'espoir de rénovation que beaucoup d'Occidentaux cherchent, souvent à la légère, dans les profonds secrets de l'hindouisme ». Mais pour Blanchot, l'action de Gandhi ne saurait constituer véritablement un exemple à suivre :
« Naturellement, nous comprenons tous que la politique de Gandhi ne tend pas seulement à une victoire politique, mais à une victoire spirituelle : il veut délivrer le peuple de ses maux, de son ignorance, lui faire vivre la vérité ; tout cela est fort clair ; ce qui l'est aussi, c'est que parmi ces maux il y a d'abord la présence de l'étranger et que le régime recommandé par le Mahatma et en vue duquel il met en jeu des forces spirituelles est un régime de libération politique, économique et sociale. Il est impossible de ne pas voir […] dans cette réhabilitation de l'action extérieure, le gauchissement de l'idéal spirituel. A l'homme il n'est plus demandé de se dépouiller de lui-même, pour rien (sans qu'aucune fin formidable puisse le justifier de ce total anéantissement), mais il reçoit le mot d'ordre d'aménager le monde, de se vaincre en vue de rendre la réalité meilleure. C'est un retour sans gloire à la morale de salut la plus vulgaire. » Intéressante critique de l'action politique du Mahatma Gandhi.
Entre avril 1941 et août 1944, Maurice Blanchot publia dans la "Chronique de la vie intellectuelle" du Journal des Débats 173 articles sur les livres récemment parus.
Dans une demi-page de journal (soit environ sept pages in-8), le jeune auteur de "Thomas l'obscur" fait ses premiers pas dans le domaine de la critique littéraire et inaugure ainsi une oeuvre théorique qu'il développera plus tard dans ces nombreux essais, de "La Part du feu" à "L'Entretien infini" et "L'Écriture du désastre".
Dès les premiers articles, Blanchot fait preuve d'une acuité d'analyse dépassant largement l'actualité littéraire qui en motive l'écriture. Oscillant entre classiques et modernes, écrivains de premier ordre et romanciers mineurs, il pose, dans ses chroniques, les fondements d'une pensée critique qui marquera la seconde partie du XXe.
Transformé par l'écriture et par la guerre, Blanchot rompt, au fil d'une pensée exercée "au nom de l'autre", avec les violentes certitudes maurassiennes de sa jeunesse.
Non sans paradoxe, il transforme alors la critique littéraire en acte philosophique de résistance intellectuelle à la barbarie au c?ur même d'un journal "ouvertement maréchaliste": "Brûler un livre, en écrire, sont les deux actes entre lesquels la culture inscrit ses oscillations contraires" (Le Livre, In Journal des Débats, 20 janvier 1943).
En 2007, les Cahiers de la NRF réunissent sous la direction de Christophe Bident toutes les chroniques littéraires non encore publiées en volumes avec cette pertinente analyse du travail critique de Blanchot : "romans, poèmes, essais donnent lieu à une réflexion singulière, toujours plus sûre de sa propre rhétorique, livrée davantage à l'écho de l'impossible ou aux sirènes de la disparition. (...) Non sans contradictions ni pas de côté, et dans la certitude fiévreuse d'une ?uvre qui commence (...) ces articles révèlent la généalogie d'un critique qui a transformé l'occasion de la chronique en nécessité de la pensée." (C. Bident).
Les manuscrits autographes de Maurice Blanchot sont d'une grande rareté.
1 200 €
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