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Autographe, Edition Originale

Louis-Ferdinand CELINE Lettre autographe signée de Louis-Ferdinand Céline à Henri Mahé "Le martyr, c'est le crachat des imbéciles"

3 800 €

Réf : 63242

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Louis-Ferdinand CELINE

Lettre autographe signée de Louis-Ferdinand Céline à Henri Mahé "Le martyr, c'est le crachat des imbéciles"

s.l. [Copenhague] 23 avril [1947], 22,5x28,4cm, 6 pp. in-folio.


Lettre autographe signée de Céline à Henri Mahé, datée du 23 avril [1947], 113 lignes à l'encre noire sur trois feuillets, corrections de la main de l'expéditeur. 
Pliures inhérentes à la mise sous pli, quelques petites taches sur le premier feuillet sans manque de texte. 
Empreinte de l'emblématique style célinien, cette longue lettre à l'un de ses plus intimes amis, révèle un exilé fébrile, tiraillé entre mal du pays et rancœur vis-à-vis de ses détracteurs.
En 1947, Céline, poursuivi par la justice française pour son engagement collaborationniste, est reclus au Danemark. Cette période de grande solitude, pénible à l'écrivain, est marquée par une importante correspondance avec ses contacts parisiens et notamment avec « [son] cher vieux », Henri Mahé, l'un des rares fidèles qui lui rendront visite dans sa captivité. L'artiste peintre, rencontré en 1929, entretient une relation amicale privilégiée avec Céline, immortalisée par son avatar dans le Voyage, et dont on perçoit toute la portée dans la lettre que Céline lui adresse. Retenu prisonnier contre son gré, Céline fantasme une Bretagne mythifiée, berceau de son amitié avec Mahé : les filles de celui-ci, filleules des Destouches, deviennent des « fées », images de la « Bretagne en fleur ». La pensée nostalgique de ce pays devient un refuge récurrent durant les années difficiles : « Mon Dieu, que vous devez être heureux ».
Articulée autour de « la petite musique » célinienne, la lettre, à l'image de toute la correspondance, fait partie intégrante de l'œuvre de l'auteur où se côtoient grotesque et tragique : « Jojo n'a pas de veine alors. […] La ténacité, bien agréable dans le cas, est souvent récompensée. Tuset représente admirablement le géniteur fin, philosophe et magnifiquement vivant… Je n'irai tout de même pas jusqu'à le recommander à Madame Jojo ! »/« J'ai vu finalement l'attaché de presse Raynaud et sa femme, deux petites ambitions promenades d'Alger satisfaites sans aucun sacrifice ni risques, champignons poussés sur le fumier de la catastrophe et des décombres ». A l'instar des romans, cette lettre met en exergue le talent d'argotiste de Céline : « Là je te dis que l'on ergote, trafouille, cafouille que c'est une joye. » Son ressentiment n'est pas seulement perceptible dans ses mots mais transparaît aussi par sa graphie, de plus en plus irrégulière, espacée et démesurée au fur et à mesure qu'il s'échauffe, certains mots étant rageusement soulignés de plusieurs traits : « Vous, vous, chère petit tête précieuse, bien habile et bien planquée, que ferez-vous, vous, pas un autre, pas le Pape, vous ?». L'ennui qui ronge Céline se devine dans l'empressement avec lequel il enjoint Mahé de lui rapporter des nouvelles de la France, qu'elles soient privées ou politiques : « Comment est l'enfant Mourlet ? Sont-ils bêcheurs ? Et Desse ? […] Que pense-t-on de de Gaulle ? Boulanger ? Badinguet ? Kerensky ? ». La plume agitée de Céline jette les informations sur le papier, multipliant les noms, sans organisation ni transitions entre les différentes affaires qui l'intéressent : « Tu ne me parles pas des Mondains ? Je te recommande une jolie revue « Courrier du Continent » […] Le cinéma français me semble bien mort… »
La régularité et l'ardeur que Céline met à sa correspondance est signe de sa détermination à ne pas être oublié ni de ses amis ni de ses défenseurs potentiels : « Je lui [Naud] ai envoyé tout mon dossier, et puis une aucune nouvelle ! Je voudrais bien qu'on le stimule. Qu'on lui demande ce qui se passe ? […] Tu vois comme tout ceci est critique […] Il faudrait prouver à Naud que j'ai des amis distingués à Paris ». La haine de Céline face aux hommes, déjà profondément enracinée dans le Voyage, s'intensifie durant l'exil et face aux accusations, qu'il subit : « Pas un jour de peine, tout en bénéfice. Ecœurant ! Tout perdre, tout souffrir pour des petits cafouilleux pareils. J'ai honte. » Mais Céline, impuissant, déplore au-delà de cette injustice présumée, la bêtise de ses accusateurs : « Il [Charbonnière] a écrit des lettres aux Danois dont la bêtise, la gafferie, la balourdise, me font pleurer, pas le crime, la sottise, les sottises ». La lettre est progressivement envahie par l'aigreur de Céline qui, accablé par ses prises de positions précédentes, choisit de rester ironiquement sur ses gardes face aux événements présents : « Moi je dis : je serai cette fois avec le plus fort et que l'on rira bien ». Belliqueux, Céline pousse la provocation jusqu'à l'image crue : « Je ne prendrai parti que lorsque tous les vainqueurs auront leurs organes coupés et enfoncés dans la bouche au plus profond, plus bas que les œsophages ».
À travers cette agressivité, transparaît une misanthropie, plus précisément dirigée contre ses compatriotes, dont il se présente comme la victime : « Je ne reproche pas aux Français de m'avoir baisé, mais ils me font mal. Ils me butent. Tout ce qu'ils racontent pour m'accabler est idiot, m'atteint tout de travers. Ils me font mal ». Cette position, dans laquelle il s'enfermera après son retour en France, causant d'ailleurs la rupture avec Mahé, entretient l'idée qu'il est seul contre tous : « Chez moi rien n'est gratuit. J'ai payé pour tout, effroyablement payé. A la guerre – et dans la paix. Les autres trichent, truquent. Je suis toujours prêt à mettre ma peau sur ma table et mes malheureux 4 sous. D'ailleurs s'il la veut, me parler, d'Honneur, homme à la disposition ! au pistolet à 25 mètres, quand on veut, comme on veut, où l'on veut, tout tordu de rhumatismes que je suis. Mais on ne sait que m'envoyer en cellule, me faire pourrir en cachot ». L'isolement atteint Céline bien plus que tout autre châtiment au point qu'il en vient presque à émettre des regrets : « Quelle misère, morale, mentale ! Avoir été se foutre là-dedans ! Quel imbécile ! Je suis éreinté par « la France du Sud-Ouest » ! Voyez-vous ça ! Que sait la France du Sud-Ouest ! C'est atroce. Ce sont des coups de pieds de l'âne perpétuels. Le martyr, c'est le crachat des imbéciles ». Ultime trait sarcastique, la lettre se clôt sur un jugement sans appel : « Mais le peuple, ce peuple qui ne veut se battre qu'à 10.000 contre un, qu'osera-t-il ? »
Ces pages acerbes dévoilent l'état d'esprit de Céline, épuisé par son exil forcé, et offrent un rare aperçu de l'effondrement que représente cet épisode qu'il lui permettra de cultiver son image de vaincu.

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