Librairie Le Feu Follet - Paris - +33 (0)1 56 08 08 85 - Nous contacter - 31 Rue Henri Barbusse, 75005 Paris

Livres anciens - Bibliophilie - Œuvres d'art


Vente - Expertise - Achat
Les Partenaires du feu follet Ilab : International League of Antiquarian Booksellers SLAM : Syndicat national de la Librairie Ancienne et Moderne






   Edition originale
   Autographe
   Idée cadeaux
+ de critères

Rechercher parmi 31246 livres rares :
éditions originales, livres anciens de l'incunable au XVIIIè, livres modernes

Recherche avancée
Inscription

Conditions de vente


Moyens de paiement :

Paiement sécurisé (SSL)
Chèques
Virement bancaire
Mandats administratifs
(Musées et Bibliothèques)


Délais et tarifs de livraison

Conditions générales de vente

Autographe, Edition Originale

Louis ARAGON Poème manuscrit : Amour d'Elsa "Jaloux des gouttes de pluie..."

Louis ARAGON

Poème manuscrit : Amour d'Elsa "Jaloux des gouttes de pluie..."

s.d. (circa 1944-1945), 20,5x27cm, 2 feuilles sous chemise et étui.


Exceptionnel poème autographe de Louis Aragon paru dans Le Nouveau Crève-cœur (1948), dans la section «Amour d'Elsa». Quarante vers en deux feuillets rédigés à l'encre noire, sous chemise-étui.
Notre manuscrit fait partie, avec un autre poème inédit, d'un ensemble de treize poèmes rédigé au premier semestre de l'année 1945 et destiné à paraître dans une anthologie poétique (Aragon, chez Pierre Seghers éditeur à Paris, Collection « Poètes d'aujourd'hui » n° 2, 20 juillet 1945). Il fut adressé par Aragon comme copie de travail à son ami Claude Roy, le directeur de la publication. Le large fonds d'archives Triolet-Aragon en dépôt à la Bibliothèque nationale de France ne conserve aucun manuscrit du présent poème.
Le poème autographe est présenté sous une chemise en demi maroquin prune, plats de papier lilas à motif floral, contreplats doublés d'agneau beige, étui bordé du même maroquin, ensemble signé Thomas Boichot.
Cette amère et entraînante mélodie amoureuse fut probablement composée à la suite de ses célèbres recueils de poésie résistante (Le Crève Cœur, 1941, Yeux d'Elsa, 1942, La Diane Française, 1944). L'écriture de ces poèmes marque une période d'intense activité pour le couple Louis-Elsa, qui rejoint après le mariage la Résistance littéraire dans une France occupée, aux côtés de Paul éluard, Jean Paulhan, Paul Seghers et Jean Cassou.
Admirable exemple de lyrisme aragonien, l'œuvre marque une étape importante du retour vers Elsa Triolet dans la figuration poétique de l'auteur. Sa place au centre du Nouveau Crève-cœur, qui sera par ailleurs composés de pièces militantes, illustre un trait constant de l'écriture d'Aragon : l'association du lyrisme intime à l'engagement politique. Le ton résolument sombre de cette œuvre témoigne de la puissance de l'amour d'Elsa dans la tourmente des années d'Occupation. Le poème, revendication agressive d'une passion dévorante, traduit l'élan amoureux par une gouaille fantaisiste :
« Jaloux en toute saison
Traversé de mille clous
à perdre toute raison
Jaloux comme un chien jaloux»
Ce véritable cri de jalousie – terme que l'auteur rumine inlassablement – semble prolonger « Les Amants séparés », publiés au début de la guerre dans le Crève-cœur. On y retrouve le procédé du refrain, de la répétition à l'excès d'un motif qui exprime dans les deux cas l'angoisse de l'absence réelle, fictive, définitive ou provisoire de l'être aimé :
« Jaloux d'un chant d'une plainte
D'un souffle à peine un soupir
Jaloux jaloux des jacinthes
D'un parfum d'un souvenir
Jaloux Jaloux des statues
Au regard vide et troublant
Jaloux quand elle s'est tue
Jaloux de son papier blanc »
Elsa apparaît comme un leitmotiv, une obsession grisante qui transcende l'élégie des Yeux d'Elsa ou de La Diane Française au profit de la confidence. Au mois de 1943, le couple faillit se séparer à l'initiative d'Elsa pour protéger le réseau clandestin. De cet épisode tragique est née la peur irrationnelle de l'abandon, qui nourrit l'écriture de la partie «Amour d'Elsa». Pour autant, la simplicité candide des images et des rythmes en ferait presque oublier la mélancolie. L'œuvre témoigne en effet du « goût du réel » qui caractérise ses écrits de Résistance, un retour aux métaphores du quotidien appuyées par une versification croisée et inventive : « De la voir aimer le feu / D'une branche qui la suit / D'un peigne dans ses cheveux / à l'aurore de minuit ».
Le choix du vers heptasyllabique court et saccadé est également éloquent – et de nombreuses fois employé dans sa « poésie de Résistance », notamment dans La Rose et le Réséda. Opposé à l'octosyllabe, l'ample vers de la romance, ce vers choisi pour son imparité est remarquablement transformé par Aragon en « chanson » continue. Il fut jadis celui des rondes médiévales, les « virelais » des XIIème et XIIIème siècles, avant d'être repris par Charles Cros et Paul Verlaine. Sa musicalité séculaire et l'esthétique des romans courtois servit d'inspiration au poète-militant dans sa défense d'une identité poétique française au temps de l'Occupation. Comme le remarque Jean Dutourd « Aragon, poète classique de ce Moyen Âge dans lequel nous sommes embourbés, a établi, pour son usage, une vaste théorie poétique [...] Aragon a tout lu, et singulièrement les poètes. Il connaît comme personne le haut chant français ; il en a suivi en connaisseur les modulations variées ».
Cette ultime œuvre de la période résistante de l'auteur est le témoin de l'amour fusionnel et démesuré qu'il porte à Elsa, et compte parmi les très rares poèmes manuscrits d'Aragon encore en mains privées.
 

VENDU

Réf : 64156

Enregistrer une alerte