Librairie Le Feu Follet - Paris - +33 (0)1 56 08 08 85 - Nous contacter - 31 Rue Henri Barbusse, 75005 Paris

Livres anciens - Bibliophilie - Œuvres d'art


Vente - Expertise - Achat
Les Partenaires du feu follet Ilab : International League of Antiquarian Booksellers SLAM : Syndicat national de la Librairie Ancienne et Moderne






   Edition originale
   Autographe
   Idée cadeaux
+ de critères

Rechercher parmi 31353 livres rares :
éditions originales, livres anciens de l'incunable au XVIIIè, livres modernes

Recherche avancée
Inscription

Recevoir notre catalogue

Rubriques

Les Enquetes
Catalogues
La Lettre du Feu Follet
Echos
Portfolio
Termes et concepts de la bibliophilie
Focus
Contributions
L'enigme
A la librairie
Evenements
Editorial
Essais bibliographiques
Illustrateurs Gazette du Bon Ton

Essais bibliographiques

Notice bibliographique sur la première édition de Du côté de chez Swann de Marcel Proust

Notice bibliographique sur la première édition de
Du côté de chez Swann et de A l’ombre des jeunes filles en fleurs

 
Lorsqu’en 1913, Marcel Proust cherche un éditeur pour la première partie de sa Recherche du temps perdu, il pense bien entendu à la NRF de Gallimard qui, bien que fondée en 1911 est déjà la maison d’édition la plus prestigieuse de France.
André Gide, un des fondateurs de la NRF, est alors directeur du comité de lecture en charge du choix des manuscrits à publier.
Le mythe veut qu’il soit directement à l’origine du refus du manuscrit de Proust, arguant qu’il a lu quelques pages rébarbatives dans lequel le narrateur mange, sur plusieurs pages, des petits gâteaux en buvant de la tisane (il s’agit de l’épisode désormais fameux de la madeleine).
Marcel Proust se tourne alors vers d’autres éditeurs comme Fasquelle sans remporter plus de succès, puis conclut avec Bernard Grasset une publication à compte d’auteur, c’est-à-dire aux frais de Proust.
C’est donc dans ces conditions d’économies que se fait l’impression des premiers exemplaires de Du côté de chez Swann, au grand désarroi de Marcel Proust qui constate tous les défauts des premiers exemplaires. Il interrompt donc très vite l’impression pour corriger les coquilles de son ouvrage.

Ce sont ces défauts qui aujourd’hui permettent de distinguer le tout premier tirage des suivants. Même les 17 grands papiers (5 japon et 12 hollande) sont imprimés plus tard, après la correction des coquilles.

La faute à Grasset : C’est la coquille la plus importante qui caractérise les services de presse et les tous premiers exemplaires imprimés du premier tirage, à savoir la barre typographique « | » qui s’est glissée entre le E et le T de Grasset en bas de la page de titre. Cette "faute" fut corrigée très rapidement en cours de tirage.

L’achevé d’imprimer page 524, au revers de la dernière page de texte : L’achevé d’imprimer est toujours daté du 8 novembre 1913, mais après le premier tirage ; Proust a fait ajouter une table des matières. La dernière page de texte a donc été réimprimée sans l’achevé d’imprimer qui s’est alors retrouvé au revers de la table des matières page 528. 

Le catalogue de l’éditeur : ce petit catalogue des parutions de Grasset sur papier gris vert n’est présent que dans les premiers tirages et a été supprimé lors des tirages ultérieurs, mais également dans les exemplaires reliés à l'époque.

La couverture à la date de 1913 : Bien que toutes les pages de titre aient été imprimées avec la date 1914 (en prévision d’une sortie en début d’année 1914), il semble que l’impression ait été plus rapide que prévu et que Proust ait précipité la sortie de son ouvrage (sans doute pour avoir une chance de remporter un des prix littéraires décernés en fin d’année). Les couvertures étant imprimées après le corps de l’ouvrage, elles ont porté, pendant un temps, la mention « 1913 », puis après quelques tirages, la mention « 1914 ». Cet élément est moins important, car la plupart des exemplaires ont une couverture à la date de 1913.

Absence de mention d’édition sur la couverture : Plus fréquent, une mention dite « fictive » de 2ème ou 3ème édition fut imprimée sur certaines couvertures pour mettre en vente ces exemplaires après que les premiers tirages soient écoulés. L’éditeur, en inscrivant cette mention, souhaitait faire croire qu’il avait dû réimprimer l’ouvrage épuisé suite à son succès, alors qu’il s’agit en fait toujours de la première édition. Les exemplaires avec cette mention fictive sont toutefois fortement dépréciés.
 
Cette supercherie d’éditeur que l’on nomme « mention d’édition fictive » ou « fausse mention d’édition », était une habitude à l’époque dans plusieurs maison d’édition.

1918 : rachat des invendus et remise en vente sous couverture Gallimard : Dès la parution de Du Côté de chez Swann, André Gide se rend compte de son erreur d’appréciation et rédige une longue lettre à Proust pour s’excuser de l’avoir refusé et pour tenter de publier les autres tomes chez Gallimard.
Gallimard rachète donc à Grasset le stock d’invendus de Du côté de chez Swann (220 exemplaires), enlève les couvertures de Grasset et les remplace par des couvertures de la NRF dites « de remise en vente », il colle sur la page de titre une étiquette au nom de la Nouvelle Revue Française (NRF) et remet en vente en 1917 ce Du côté de chez Swann avec ces nouvelles couvertures et cette étiquette en page de titre. Gallimard imprime également 128 exemplaires réimposés. 

A l’ombre des jeunes filles en fleurs :
A cause de la Guerre, le second volume ne paraîtra qu’en 1918 et obtiendra le prix Goncourt, malgré tous les excellents romans de l’époque relatant la tragédie de 14-18.
L’obtention du prix Goncourt a cette particularité de systématiquement donner lieu à une seconde édition, souvent la même année que l’originale. La première chose à vérifier sur un exemplaire est l’achevé d’imprimer : le 30 novembre 1918.
Il devait être tiré 70 exemplaires en grands papiers (annoncés dans la justification de tirage) de cette édition, ce qui est toujours infime en regard de l’importance que va acquérir l’œuvre de Marcel Proust. En réalité, 128 exemplaires réimposés seront imprimés quelques mois plus tard au nouveau format dit "in-quarto Tellière", en même temps et au même format que les grands papiers du Swann
Hormis ces grands papiers, qui sont imprimés plus tardivement, les bibliophiles vont distinguer un premier tirage sans mention d’édition (sur la couverture et la page de titre) et un second tirage comportant une fausse mention de deuxième à cinquième édition.
Aussi rare que le Swann avec la "faute à Grasset", L’Ombre des jeunes filles sans mention a été imprimé à environ 500 exemplaires (sur un tirage total de 3242, les exemplaires suivants présentent une mention fictive sur la couverture). Beaucoup de bibliophiles se contentent donc d’un de ces exemplaires comportant sur la couverture (sous le titre) une mention « fictive » qui peut aller de la seconde à la cinquieme édition (d'après nos observations).

La suite de la Recherche :
Le succès étant dès lors assuré, Gallimard imprimera désormais pour les volumes à venir, deux grands papiers : l’un réimposé (c’est-à-dire en format in-quarto) imprimé sur papier vergé à environ 100 exemplaires, et un second imprimé sur papier vélin Pur Fil à environ 1000 exemplaires. Les bibliophiles pourront ainsi enfin se procurer les ouvrages de Proust sur beau papier. L’édition sur papier courant ne présente pas, pour ces volumes, d’intérêt bibliophilique.
 
En résumé, il existe au moins trois types de collections prestigieuses de A la Recherche du temps perdu :
 
L’une consiste à réunir les exemplaires en format réimposé in-quarto.
 
Dans cette collection, les deux soucis majeurs sont :
-        La difficulté de trouver A l’ombre des jeunes filles en fleurs en réimposé, car son prix est excessif.
-        Et surtout l’absence de format réimposé pour l’édition originale de Du côté de chez Swann.
Pour que cette collection reste esthétique, il faut sacrifier l’édition originale du premier volume en la remplaçant par l’édition Gallimard réimposée de Swann parue en 1919.
 
La seconde collection est plus purement bibliophilique. Elle consiste à réunir les éditions originales en premier tirage pour les premiers volumes (donc en papier courant) et en vélin pur fil pour les suivants. La difficulté, outre celle des deux premiers volumes, consiste à trouver des éditions en Vélin Pur Fil dans un bel état, ce qui n’est pas souvent le cas.
 
La troisième collection est historique. Elle consiste à réunir les éditions originales en privilégiant leur provenance par la dédicace manuscrite de l’auteur.
Toujours unique, l’exemplaire dédicacé porte en lui l’histoire de l’œuvre et de son auteur. L’importance du dédicataire, son intimité avec l’auteur et son lien avec l’œuvre elle-même, font de l’ouvrage dédicacé un témoin unique de la création de l’œuvre.
La plus grande gageure est alors de trouver un exemplaire dédicacé du premier tome (avant que Proust n’ait acquis sa renommée) et, si possible, une dédicace « signifiante », c’est-à-dire un dédicataire ayant un lien important avec l’auteur et avec son œuvre.


Retrouvez toutes les éditions originales et livres dédicacés de Marcel Proust sur Edition-originale.com :

Marcel Proust : livres dédicacés, éditions originales, autographes et manuscrits
Laisser un commentaire

Librairie Le Feu Follet - 28/03/2019 16:34

Bonjour,

Merci pour votre très aimable commentaire. Afin d'obtenir un estimation précise de votre exemplaire, il vous suffit d'en soumettre les détails à notre expert en suivant ce lien :

https://www.edition-originale.com/fr/expertise-livre

Vous recevrez une réponse rapidement.
A bientôt,
Bien cordialement,
Le Feu Follet


jean - 28/03/2019 12:29

Superbe explication, fort claire et précieuse.
Quelle serait la valeur d'un des 220 exemplaires du Coté de chez Swann rachetés par Gallimard à Grasset et portant la nouvelle couverture et la contre étiquette de la NRF ?
Merci pour votre aide ?