Henri BERAUD
Lettre autographe de prison datée et signée et adressée à sa belle-mère qu'il appelle affectueusement "sa chère maman" : " ...Ne regrettez pas trop de ne pouvoir faire le voyage, en raison, primo de ce temps sans bonne grâce, et secundo de l'état moral plutpot vaseux de votre gendre. Mauvaise période ! ..."
S.n., Poissy 22 Juin 1946, 13x21cm, une page recto verso.
Belle lettre autographe datée et signée d'Henri Béraud adressée à sa belle-mère alors qu'il est incarcéré à la prison de Poissy (43 lignes à l'encre bleue sur une page recto-verso) souffrant psychologiquement de sa situation de prisonnier.La lettre est à en-tête de l'infirmerie de la maison centrale de Poissy, trace de pliure inhérente à la mise sous pli.
Affecté moralement, le prisonnier Henri Béraud tente de faire preuve d'optimisme en relativisant sur ses avanies :
"... Mauvaise période ! Mais après la pluie le beau temps. Celui qui a trouvé cela est un consolateur qui en vaut bien d'autre, et qui, somme toute, n'est pas le plus bête..."Il prie sa femme Germaine de lui faire parvenir :
" ... Si elle en a la possibilité, elle peut forcer sur le pain d'épices, qui vraiment est d'un grand secours..." et se réjouit ironiquement de sa condition
: "... Pour le reste, madame la marquise, tout va très bien, trop bien ! "Enfin, Henri Béraud attend impatiemment une nouvelle photographie de son épouse:
"... pour cela, je suis insatiable. Et ma cellule, pourtant, en est illuminée dejà ! ..."Bon vivant natif de Lyon, Henri Béraud est un journaliste et reporter international (
Le canard enchaîné, Le Crapouillot, Petit Parisien, France-Soir et Gringoire) et un écrivain prolifique (Prix Goncourt 1922 pour
Le martyre de l'obèse et
Le vitriol de lune paru un an plus tôt) dont l'évolution politique, passant de l'extrême gauche à l'extrême droite pro-collaborationniste, est caractéristique de l'inexorable montée en puissance des totalitarismes de l'entre-deux guerres et du dévoiement de nombreux intellectuels français. Ami de Roland Dorgelès, Albert Londres et surtout de Joseph Kessel qu'il rencontra en 1922 en Irlande alors récemment et partiellement libérée du joug britannique, Henri Béraud défend des opinions très à gauche. Mais après un voyage en U.R.S.S., il commence à réviser ses positions tout en dérivant vers l'antiparlementarisme, l'anglophobie (
Faut-il réduire l'Angleterre en esclavage ? paru en 1935 et dédié à Joseph Kessel), l'antisémitisme "sans s'en rendre compte" selon son ami le journaliste Jean-Galtier Boissière. C'est l'affaire Stavisky et son corollaire les émeutes des ligues fascistes et antiparlementaristes du 6 Février 1934 qui déclenchent chez Henri Béraud son passage manifeste à l'extrême droite allant jusqu'à rompre son amitié avec son grand ami Joseph Kessel. En 1936, ses violents articles dans Gringoire conduiront au suicide du ministre de l'intérieur du Front Populaire Roger Salengro accusé de désertion pendant la Première Guerre Mondiale. Arrêté en septembre 1944 et condamné à mort le 29 décembre 1944 pour intelligence avec l'ennemi, il est gracié par le général De Gaulle.
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Réf : 84179
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