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Emile ZOLA Lettre autographe signée adressée à Henry Fouquier à propos de La Terre : "Je me suis exténué à faire sortir cette vérité de mon livre, si l'on ne m'a pas compris, la faute en est sans doute à moi."

Emile ZOLA

Lettre autographe signée adressée à Henry Fouquier à propos de La Terre : "Je me suis exténué à faire sortir cette vérité de mon livre, si l'on ne m'a pas compris, la faute en est sans doute à moi."

Paris 11 février 1888, 13,2x20,5cm, 2 pages sur un double feuillet.


Lettre autographe signée d'Emile Zola adressée à Henry Fouquier, rédigée à l'encre noire sur un double feuillet. Pliures inhérentes à l'envoi.
Cette lettre a été transcrite dans la correspondance complète d'Emile Zola éditée par le CNRS et les Presses de l'Université de Montréal.
Belle lettre évoquant La Terre et La Puissance des Ténèbres de Tolstoï.
Henry Fouquier (1838-1900) fut critique littéraire et chroniqueur pour de nombreux journaux. Proche ami de Guy de Maupassant, il appuya la candidature d'Emile Zola à l'Académie française.
Cette lettre lui a été adressée au lendemain de la représentation de La Puissance des Ténèbres de Tolstoï au Théâtre-Libre. Nous n'avons pu trouver trace d'un article dans lequel le journaliste aurait fait le rapprochement entre le drame russe et La Terre d'Emile Zola, mais ce dernier lui adresse ici des remerciements : « Merci, mon cher Fouquier, de ce que vous voulez bien dire de « la Terre », si attaquée. J'en suis touché vivement, et croyez à toute ma gratitude. » Il faut dire que la critique n'a pas été tendre avec le quinzième volume des Rougon-Macquart qui, dès sa parution en feuilleton dans le Gil Blas, déchaîna les passions. Le 18 août 1887, alors que la fin du roman n'est même pas encore révélée au public, paraît dans Le Figaro le « Manifeste des Cinq », rédigé par Paul Bonnetain, J.-H. Rosny, Lucien Descaves, Paul Marguerite et Gustave Guiches. Ces jeunes auteurs dressent un constat sans appel : « La Terre a paru. La déception a été profonde et douloureuse. Non seulement l'observation est superficielle, les trucs démodés, la narration commune et dépourvue de caractéristiques, mais la note ordurière est exacerbée encore, descendue à des saletés si basses que, par instants, on se croirait devant un recueil de scatologie : le Maître est descendu au fond de l'immondice. [...] Nous répudions ces bonshommes de rhétorique zoliste, ces silhouettes énormes, surhumaines et biscornues, dénuées de complication, jetées brutalement, en masses lourdes, dans des milieux aperçus au hasard des portières d'express. De cette dernière œuvre du grand cerveau qui lança L'Assommoir sur le monde, de cette Terre bâtarde, nous nous éloignons résolument, mais non sans tristesse. Il nous poigne de repousser l'homme que nous avons trop fervemment aimé. »
Zola, qui mûrissait l'idée d'un roman paysan depuis une dizaine d'années, est profondément touché et bien qu'il n'ait aucune réaction publique à ces accusations, sa correspondance est essaimée d'explications de l'œuvre dont seule la brutalité semble avoir retenu l'attention des lecteurs : « Mais vous ajoutez que notre thèse, à Tolstoï et à moi, est la même et peut se résumer en ceci : le travail de la terre est corrupteur. Tolstoï, il me semble, protesterait bien haut, et quant à moi, je vous affirme que je n'ai jamais voulu prouver une telle chose, radicalement fausse à mon avis. Ce que je pense, c'est que la petite propriété, telle qu'elle existe chez nous, c'est que la suite de faits sociaux qui ont abouti à notre forme sociale, nous ont donné notre paysan d'aujourd'hui, avec ses qualités et ses vices. Notre paysan est le prisonnier de sa terre, et non l'homme libre qu'il devrait être. Comment voulez-vous qu'il n'y étouffe pas, dans son ignorance et sa passion unique ? Labourer est très sain, mais à la condition qu'on sera le maître de son champ, au lieu d'en être le forçat. Je me suis exténué à faire sortir cette vérité de mon livre, si l'on ne m'a pas compris, la faute en est sans doute à moi. »
Très belle lettre du maître du naturalisme révélant une nouvelle facette de l'un des plus brutaux volumes des Rougon-Macquart.
 

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Réf : 79098

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