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Renée VIVIEN Lettre autographe signée adressée à Natalie Clifford Barney : "Je te l'ai dit par la voix brute du télégraphe, Natalie, le moment n'est pas venu de nous revoir. "

Renée VIVIEN

Lettre autographe signée adressée à Natalie Clifford Barney : "Je te l'ai dit par la voix brute du télégraphe, Natalie, le moment n'est pas venu de nous revoir. "

s.l. [Paris] Le 1er avril [1902], 11,5x15,9cm, 7 pages 1/2 sur deux doubles feuillets.


Lettre autographe signée « Pauline » de Renée Vivien adressée à Natalie Clifford Barney et rédigée à l'encre noire sur deux doubles feuillets à liseré de violettes.  Pliures transversales inhérentes à l'envoi.
Intéressante lettre évoquant Brumes de Fjords et Freddy Manners-Sutton.
« Tu te trompes en croyant retrouver dans Brumes de fjords un reflet de femme ou l'influence d'une pensée de poète norvégien. Je les ai faites d'un souvenir très lointain de ce pays mystique et de quelques rêves lourds de nostalgies. » Brumes de fjords est le premier recueil de poèmes en prose de Renée Vivien qui paraîtra en juin 1902. Natalie et Renée sont alors séparées mais cette lettre atteste bien que la Muse aux violettes continuait à soumettre ses textes à l'Amazone malgré la distance physique et sentimentale qui les sépare. « Car j'ai dans ma vie une tendresse que je crois sincère – quoi qu'il me soit difficile aujourd'hui de croire à la sincérité, même lorsqu'elle me montre ses larmes. »
Cette lettre a en effet été adressée à Natalie Clifford Barney alors que cette dernière se trouve aux Etats-Unis : « Je serais venue si tu avais eu besoin de moi. Toi-même tu m'as télégraphiée que ma présence était inutile. (lorsque ton temps était pris par un flirt) Freddy Manners-Sutton ? qui sait ? et qu'importe ? Il est trop tard maintenant. Je ne viens pas t'amuser ni remplacer une distraction absente. Si tu viens à Paris cet hiver je te verrai une ou deux fois – comme on revoit le visage lointain de son passé – sans colère, sans haine, mais aussi sans amour. » Renée laisse ici libre cours à sa jalousie, évoquant Freddy Manners-Sutton, ami de Natalie : « En réalité, Vivien ne pouvait supporter Manners-Sutton. Dans Une femme m'apparut, elle l'appellera tout simplement Le Prostitué et dira de lui : Il est banal comme l'adultère. Cette antipathie se transformera en une haine féroce lorsqu'un peu plus tard Vivien apprendra que cet homme se faisait passer pour le fiancé de Natalie Barney. Sacrilège suprême… ! Mais Vivien ne savait pas – ou bien voulait ignorer – que cette rumeur était en fait propagée par Natalie Barney elle-même, afin de donner le change à ses parents. Non, pensait-elle, ce personnage au-dessous de toute insulte veut tout simplement capter la fortune de Natalie ! » (J.-P. Goujon, Tes blessures sont plus douces que leurs caresses)

C'est à la fin de l'année 1899 et par l'intermédiaire de Violette Shillito que Renée Vivien – alors Pauline Tarn – fit la connaissance de Natalie Clifford Barney « cette Américaine plus souple qu'une écharpe, dont l'étincelant visage brille de cheveux d'or, de prunelles bleu de mer, de dents implacables » (Colette, Claudine à Paris). Natalie, qui venait de vivre une idylle estivale avec la sulfureuse Liane de Pougy qui l'a initiée au saphisme, ne prêta qu'une attention discrète à cette nouvelle connaissance. Renée en revanche fut totalement subjuguée par la jeune Américaine et relatera ce coup de foudre dans son roman autobiographique Une Femme m'apparut : « J'évoquai l'heure déjà lointaine où je la vis pour la première fois, et le frisson qui me parcourut lorsque mes yeux rencontrèrent ses yeux d'acier mortel, ses yeux aigus et bleus comme une lame. J'eus l'obscur prescience que cette femme m'intimait l'ordre du destin, que son visage était le visage redouté de mon avenir. Je sentis près d'elle les vertiges lumineux qui montent de l'abîme, et l'appel de l'eau très profonde. Le charme du péril émanait d'elle et m'attirait inexorablement. Je n'essayai point de la fuir, car j'aurais échappé plus aisément à la mort. » « Hiver 1899-1900. Débuts de l'idylle. Un soir, Vivien est invitée par sa nouvelle amie dans l'atelier de Mme Barney [mère de Natalie], 153 avenue Victor-Hugo, à l'angle de la rue de Longchamp. Natalie s'enhardit à lire des vers de sa composition. Comme Vivien lui dit aimer ces vers, elle lui répond qu'il vaut mieux aimer le poète. Réponse bien digne de l'Amazone. » (J.-P. Goujon, op. cit.) Suivront deux années d'un bonheur inégal, rythmées par les infidélités récurrentes de Natalie et la jalousie maladive de Renée dont les lettres oscillent entre déclarations enflammées et douloureux mea culpa. « Renée Vivien, c'est la fille de Sappho et de Baudelaire, c'est la fleur du mal 1900 avec des fièvres, des envols brisés, des voluptés tristes. » (Jean Chalon, Portrait d'une séductrice)
En 1901 survint une importante rupture qui durera presque deux années ; Renée, malgré les sollicitations de Natalie et les intermédiaires qu'elle lui envoie pour la reconquérir, résiste. « Les deux amies se revirent, et se fut, en août 1905, le pèlerinage à Lesbos, qui constitua une déception pour Natalie Barney et demeura sans lendemain. […] Le ressort était définitivement brisé. Les deux anciennes amies cessèrent de se voir dès 1907, et Vivien mourut sans qu'elles se soient revues. » (J.-P. Goujon, Ibid.)
Précieuse et très rare lettre de Sapho 1900 à l'Amazone.
 

3 000 €

Réf : 78981

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